top of page
Google_Play_Store_badge_FR.svg.png

L’histoire du projet racontée par TiBert

 

Tout a commencé au début d'octobre 2021, alors que nous étions encore en pandémie et que les écoles n’étaient pas en mesure de préciser leur programmation. Mes prochains contrats étaient pour le début 2022 et en attendant, je ne voyais rien dans l’immédiat. Comme bien des artistes qui vivent des périodes creuses, j’ai commencé à souffrir d’insécurité et je me suis tourné vers l’univers… Je l’ai d’abord remercié pour les retombées des cinq dernières années avant de le prier de m’accorder une façon d’utiliser mes compétences. Le jour suivant, j’étais en conversation avec ZenFri Inc. une compagnie avec qui j’avais déjà des liens. Ils m’ont parlé de leur intérêt pour la réalité augmentée et, comme je suis guide touristique, l’idée d’une application géoréférencée pour présenter des histoires s’étant déroulées à Saint-Boniface a fait son chemin.

 

J’ai eu 30 jours pour conceptualiser le tout et communiquer avec les organismes concernés en mesure de fournir une lettre d’appui au projet, afin de soumettre une demande d’octroi au Conseil des arts du Canada avant la date limite. C’est en avril 2022 que j’ai appris la bonne nouvelle que nous avions obtenu les sous pour commencer la réalisation du projet.

 

Les mois d’intense activité qui ont suivi ont servi à toute une équipe d’historien·ne·s, d’auteur·e·s, de consultants autochtones, etc. à fouiller l’histoire et à produire les renseignements inhérents à 12 sites connus à Saint-Boniface. Il y a eu la découverte de faits déchirants dans cette histoire « cachée » sur la façon dont s’est bâtie la Nouvelle-France…

 

C’est ainsi qu’à la fin mai 2023, nous avons lancé l’application Histoire cachée – In Plain Sight, dans les ruines de la cathédrale de Saint-Boniface. L’application est disponible sur iPhone (App Store) et Android (Google Play).

 

Les textes et les anecdotes présentés dans Le Nénuphar proviennent de cette application.

Le Rendez-vous

Après un voyage éprouvant, les voyageurs sont de retour au fort! Voyez l’accueil chaleureux que leur ont réservé leurs amis et leurs familles à leur arrivée. Que la célébration commence!

RendezVous-2.png

Près du fort Gibraltar, le « rendez-vous » se trouve du côté ouest du fort. En partant des portes d’entrée du fort, tournez à droite et continuez en longeant le mur, puis regardez vers le nord. 

CALEPIN HISTORIQUE

 

Située au confluent des rivières Rouge et Assiniboine, La Fourche a été une plaque tournante régionale du transport et du commerce pendant des milliers d’années. Lorsque les Européens sont arrivés dans la région, ils ont profité des réseaux commerciaux existants et établi des postes de traite comme le fort Gibraltar. Construit en 1810 par la Compagnie du Nord-Ouest (CN-O), le fort est devenu un centre de transbordement et une fortification stratégique. Il servait surtout à la gestion de l’approvisionnement en produits alimentaires et commerciaux. Pour cette activité, on comptait surtout sur le travail des employés de la Compagnie qu’on appelait des engagés ou des voyageurs. Leur sens de l’aventure, leur désir de mobilité sociale ascendante et leur force physique incroyable en faisaient une main-d’œuvre dynamique sur laquelle les classes supérieures, les commis et les bourgeois, comptaient énormément. Les tâches étaient ardues et parfois même mortelles. Les voyageurs pagayaient et portageaient toute la journée pendant de longs mois en veillant à ce que les fournitures de la CN-O se rendent dans l’ouest du pays, et que les fourrures convoitées se rendent dans l’est. La douleur associée à un travail pénible et à la perte de leurs camarades rapprochait les voyageurs au moment d’atteindre le cœur d’un continent riche en ressources et en communautés diversifiées.

 

Les voyageurs ont non seulement établi des relations durables entre eux, mais ils ont fait de même avec le territoire et les communautés autochtones dont dépendaient les entreprises pour la main-d’œuvre, les provisions, les fourrures, les connaissances et même les compagnes. Bon nombre de voyageurs et de commis se sont mariés dans des familles autochtones pour de multiples raisons. Ces mariages avaient des motifs commerciaux, politiques ou personnels. Les relations avec des femmes autochtones donnaient aux voyageurs et aux commis un meilleur accès à des provisions, ainsi qu’un filet de sécurité sociale (sous la forme d’une famille étendue et d’une communauté) en cas de conflit avec d’autres nations autochtones ou des entreprises concurrentes. Les Européens comprenaient très bien la situation, car ils étaient habitués à consolider les relations entre des familles, des maisons et même des nations par le biais de mariages politiques.

 

De tels mariages, de même que d’autres célébrations comme le « rendez-vous », pouvaient prendre la forme de petits événements, par lesquels les commis et les associés faisaient la fête en offrant à leurs employés de la nourriture et un petit verre d’eau-de-vie ou bien de plus grandes réceptions agrémentées de musique et de danse. Bien que peu de voyageurs apportaient leur violon en canot, ils portaient certainement sur eux de petits instruments de musique, comme un fifre ou une guimbarde. Plusieurs comptes rendus de leurs veillées décrivent des tambours portatifs probablement inspirés de ceux des Autochtones. Les « rendez-vous » étaient également l’occasion de pratiquer le passe-temps préféré des voyageurs, le jeu. Les engagés étaient reconnus comme de grands preneurs de risques, tant dans leur travail que dans leurs loisirs. Ils pratiquaient la boxe, la course le canotage et la lutte. Ils pariaient pour leur boxeur ou lutteur préféré. Les associés participaient souvent à ces activités, pariant avec d’autres associés sur leur canot préféré et son équipage. Les voyageurs s’adonnaient aussi à des jeux de hasard et de stratégie, comme le jeu de la mitaine, le farkle et le jeu des mérelles. Au bout du compte, un « rendez-vous » était un excellent moyen pour les associés de récompenser leurs travailleurs et de maintenir la discipline. Dans le cas des voyageurs, cela leur permettait de gagner du capital social, de se faire de nouveaux amis et de réaffirmer leur longue et solide amitié, forgée dans le travail.

Ouf! Il y a du monde icitte, à soir. Je vois Ti-Jos pis Pierre à côté des canots.

Ils sont des meilleurs amis depuis leur voyage l’année dernière.

Survivre des dangers ensemble, ça crée des amitiés fortes. Pis ça, c’était un des pires voyages, ça.

Ils en ont perdu deux : un mort noyé, l’autre le cou cassé pendant un portage.

Je sais pas comment ils ont fait pour se rendre icitte dans un morceau.

J’étais sûre que Ti-Jos allait arrêter après ce voyage-là. Il était en mesure de le faire; son contrat était fini.

Mais non, il y en a qui aiment ça l’aventure d’être engagé. Mon Jacques est comme ça.

Bonyenne, j’aimerais qui reste à maison mon petit. Pu si petit que ça, mon plus jeune.

On me disait qu’il était revenu aujourd’hui, mais je le vois nulle part. Oh, c’est-tu lui à côté du feu?

Ah, il parle à la jeune Crie qui est venue avec sa famille vendre du pemmican au fort. Elle est pas mal belle.

Ça ferait des beaux petits-enfants, ces deux-là.

Je me demande si avoir une belle jeune femme qui l’attend l’encouragerait, mon Jacques, à rester à maison…

Je sais que ça paie bien, mais ça vaut pas sa vie, quand même!

Oh oui! On sort des instruments! Arrêtez de jacasser, vous autres. C’est le temps de danser et chanter.

Ouain, ouain. Je sais que vous avez plein de choses à vous dire et que ça fait longtemps que vous vous êtes pas vu, mais y’en a icitte qui attendent depuis un bon bout de temps pour des bons partenaires avec qui danser.

Pis, si vous avez remarqué, il y a du monde venu de partout pour faire la traite.

Mais bientôt, on va partir à la chasse au bison de l’automne, pis il n’aura plus de trous pour une secousse.

J’aime ben ça quand tout le monde se rencontre au fort. Ça fait comme la fête du jour de l’an plus qu’une fois par année!

Wôô! Yâ dju mond isitte aswerre. J’wè Ti-Jos pi Pierre a kôti di kanou.


Depwi leu darnyé wéyaj l’anni pâssi, sonta di bein bon z’ami. Kan sa survi di danji ansanb, sa fa di z’amichyé bein forte.


Pi sâ, sta ein di pire wéyaj, sâ. Y n’ava pardju deu : ein, yé morre nwèyé, l’ôt, y si kâssi l’kou pandan ein portaj.


Shé pâ koman ksa lâ fette pour arrivi isitte dan ein morsô. Sh’ta sur ke Ti-Jos l’ita pour arrêti apra s’wéyaj-lâ.


Mé non. Y nâ ksa l’emme sâ l’avanchur di wéyaji.


Mon Jacques li parèye. Bonyenne, j’emmera ke mon pchi resse a mizon.


Mé mon pluss jenne li pu si pchi ksâ. Sa ma dji ki l’ita r’v’nu back ojordjwi mé j’lâ pâ vu nulparre. Oh!


Si tchu lwi a kôti dju feu? Ah! Y parl a la jenne Crie ke lâ v’nu avek sa faméye pour vand dju pemmikan ô forre.


A li pâ mal belle. Sa f’ra di bô pchi-zanfan, si deu-lâ.


J’ma d’mand si mon Jacques, sa l’ankourajra a resti a mizon si y’arra enne belle jenne famme ke l’attan.


J’sé ksa pèye bein mé, sa vô kan mêm pâ sa vi.


A wè. Sa sor la muzik. Arrêti d’parli vouzôt. Si l’tan d’dansi pi shanti. Wè, wè.


J’sé ksa bein di z’aferre a djirre, pi sa fa lontan ksa sé pâ vu, mé y nâ isitte ksa l’attan depwi lontan pour trouvi dju mond avek ki dansi.


Pi, sa lâ tedbein vu, ke lâ dju mond k’ita v’nu di toupartou, pour ferre la trette.


Pi didan-lâ, mé, dan pâ gran tan, sa vâ parchir pour la shasse ô boflô de l’automne, pi y’aura pu d’senne pour enne bonne secousse.


J’emme bein sâ kan toul’mond y s’rankont ô forre. S’kom la fêt d’la fête du jour de l’an, pluss k’enne fwè par anni.

retour.png

Une mère métisse près du fort

La vie domestique d’une famille métisse près du fort était très exigeante! Les tâches étaient nombreuses à l’automne, allant des récoltes, de la vérification des pièges et de la chasse au bison, au commerce des marchandises au fort. Naturellement, il y avait toujours du lavage à faire! Certaines choses ne changent jamais!

02-MetisHome-1.png

En partant des portes d’entrée du fort, marchez environ 10 à 20 mètres vers la colline devant vous (vers le sud). Dirigez votre appareil vers la colline pour voir la propriété métisse.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Les Métis de la Rivière-Rouge constituent une nation unique en son genre. En raison de circonstances toutes particulières de nature économique, sociale et politique, un groupe de personnes qui partageaient la même histoire et des coutumes axées sur le territoire est devenu une nation à part entière qui a exercé un pouvoir immense au cours du XIXᵉ siècle. De façon générale (mais pas toujours), les Métis étaient les descendants de manœuvres, commis et associés français, écossais et anglais, et de femmes des nations Anishinaabe, Ininew (Moskégons), Nacoda (Assiniboines) et Nehiyâw (Cris des plaines). Au terme de leur contrat, les hommes avaient un choix de signer un nouveau contrat ou de prendre leur retraite à titre de citoyen et demeurer dans l’Ouest avec leur famille. Ils pouvaient également retourner en Angleterre, en Écosse, aux États-Unis, au Haut-Canada ou au Bas-Canada avec leur famille, ou abandonner entièrement cette dernière. Ceux qui ont choisi de rester avec leur épouse autochtone et leurs enfants ont donné naissance à la nation métisse de la Rivière-Rouge.
 
Du milieu à la fin du XVIIIᵉ siècle, la région de la rivière Rouge a vu arriver un certain nombre de commerçants français indépendants qui établissaient de petits postes de traite des fourrures de martre et de castor. Ces commerçants faisaient parfois des affaires pendant quelques années seulement, mais un bon nombre d’entre eux sont restés. La documentation sur les activités de ces hommes et de leurs postes est quasi absente, à l’exception des plaintes des commissionnaires de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) : ces intrus perturbaient les réseaux commerciaux sur lesquels la CBH se fiait pour son approvisionnement en fourrures de la baie d’Hudson. Néanmoins, certains commerçants sont restés, se sont mariés dans les communautés autochtones et ont construit de petites maisons d’une seule pièce selon la technique des poteaux sur sole (à tout le moins selon les normes des observateurs européens). Ils cultivaient aussi la terre et produisaient des pommes de terre et du maïs. Ils plantaient, entretenaient et récoltaient même du riz sauvage dans la région « d’entre-les-lacs ». Il n’est pas surprenant qu’ils aient complété leur régime alimentaire avec la chasse et la pêche, et vendu leur surplus aux entreprises de traite des fourrures qui avaient besoin de provisions. Malgré l’importance du pemmican pour les entreprises, la chasse et la pêche à petite échelle leur procurant de la viande et du poisson frais étaient des activités très prisées, surtout par les associés et les commis qui hivernaient et se fatiguaient rapidement des aliments en conserve.
 
Le mode de vie des Métis était très saisonnier et dépendait de la migration des animaux qu’ils chassaient et de la variabilité des conditions climatiques. Leur proximité sociale et physique avec les Premières Nations leur donnait accès à des réseaux commerciaux. En outre, leur familiarité avec les entreprises européennes et leurs motivations en faisaient une nouvelle force puissante dans les Prairies. Ayant appris de leurs mères à chasser, pêcher, se ravitailler et cultiver la terre, certains jeunes hommes métis étaient en mesure de profiter des intérêts de leurs pères en infiltrant leurs cercles sociaux et en acquérant du capital social et économique au sein des entreprises de la colonie de la rivière Rouge et au-delà, comme au Bas-Canada et au Royaume-Uni.
 
La Compagnie du Nord-Ouest (CN-O) a tissé des liens étroits avec la nation métisse émergente au confluent des rivières Rouge et Assiniboine. À l’occasion, la CN-O confiait certaines tâches en sous-traitance à la population croissante, comme l’affrètement de marchandises et des provisions et, avec le temps, plusieurs Métis en sont venus à occuper des postes supérieurs dans l’entreprise. Ces hommes étaient habituellement les fils de commis ou d’associés de la CN-O qui avaient étudié à Montréal ou, dans des cas exceptionnels, en Europe. Cutberth Grant fils était l’un de ces hommes qui travaillaient au fort Gibraltar et, plus important encore, qui est devenu un chef de file des Métis de la colonie de la rivière Rouge.
 
Après les chasses au bison, les Métis pouvaient également exploiter leurs réseaux commerciaux pour établir des systèmes de roulage et d’affrètement qui sont restés actifs jusque vers la fin du XIXᵉ siècle. Cela leur a permis d’établir de nouvelles relations avec les Américains en se rendant plus au sud de la vallée Pembina, loin de la portée du monopole de la CBH. Cela devait tôt ou tard causer un nouveau conflit entre la CBH et les Métis, lequel prendra fin par le procès de Guillaume Sayer, un marchand indépendant accusé de commercer en enfreignant le monopole de la CBH. Le procès s’est terminé de façon inattendue par un acquittement, car les amis et la famille de Sayer s’étaient présentés sur le terrain du tribunal avec des armes à feu. C’est ainsi que les Métis ont encore une fois fait la preuve qu’ils constituaient la trame essentielle du tissu social de la rivière Rouge.

EN FRANÇAIS

Chapitre 02.jpg

EN MÉTCHIF

​Bienvenue, bienvenue! J’vas m’excuser d’avance. C’est ben occupé icitte à ce temps-ci de l’année.


J’sais pas pourquoi toute semble arriver à même temps. Excusez-moi un moment.


Angélique! Poigne ton frère pis allez au jardin cueillir le maïs au plus sacrant; j’suis pas mal sûre qui va mouiller cet après-midi.


Ah, les jeunes d’aujourd’hui. Ils veulent toujours nous donner du fils à retordre. Dans mon temps, on disait :


« Oui, Maman. Tout de suite, Maman. » Ben, fallait ben. Y’ avait juste nous autres pis Maman.


Papa était engagé de la Compagnie. C’est fou, hein? Je m’étais décidée que j’allais pas vivre comme ça quand je serais grande.


Pis cossé qui arrive? J’tombe amoureuse d’un voyageur, moé itou!


Au moins quand qu’il part, on n’est pas laissées seules, il y a plus de familles qui se sont établies dans les alentours à cause du fort.


Le fort achète du maïs, des patates, du poisson, du riz sauvage pi d’la viande fraîche qu’on chasse.


Les crédits qu’ils nous donnent pour ça, on les dépense sur des choses comme des couvertures, des bonnes scies, du thé fort pi du sucre.


Pi, faut pas oublier les chasses au bison! François! vas voir nos trappes. On a besoin d’une couple de lapins pour souper.


Je te dis que c’est le temps qu’on aille à chasse d’automne. Nos réserves sont pas mal finies.


Heureusement que mon Jacques est revenu saint et sauf de son premier gros voyage. Il va être capable de faire la chasse.


C’est pas le meilleur tireur, mais il est bon cavalier, mon Jacques. J’aime mieux le voir à cheval que dans un canot.


Bon, cossé qui faut faire pour préparer la chasse? J’devrais demander à mes voisins nacoda s’ils ont vu des bisons.


Oh Angélique, oublie pas d’aller chercher le linge sale au fort.


Je sais que j’ai dit qui va mouiller, mais on peut bien les laver pendant qui mouille pis les étendre à sécher une fois que ça arrête.


Crime, j’avais oublié qu’il faut que j’aille faire le ménage au fort.


Bonyenne que je suis fatiguée. Des fois, je regrette pas l’arrivée de l’hiver.


Au moins, je dors un peu pendant cette saison-là, pi on a le temps de se rencontrer.


La récolte c’t’année a été pas mal bonne, on a assez de crédit pour acheter notre thé… tu reviendras au temps des fêtes pi on prendra une tasse ensemble.

Beinv’nu, beinv’nu. Ma m’ixkuzi toutte switte. Si bein okupi a stan-sitte d’l’anni.


Shé pâ pourkwè mé, toutte arrive an mêm tan, on djira. Scuzi-mwé, shré pâ lontan.


Angélique ! Pâgne ton frérre pi alli ramâssi l’blédeinde dan l’jardein, ô plu sakran. Shu pâ mal sartenne k’apra-midji, y vâ mouyi.


Ahh ! li jenne d’ojordjwi. Sa veu toultan no danni d’la mizerre. Dan mon tan, on djiza : « Wè Mâman, Touswitte Mâman. »


Falla bein. Y’ava yeink Mâman pi nouzôt. Pâpa l’ita ein angaji par la Konpagni.


Mé si bêt, hein ? J’ava disidi ke sh’ta pâ pour viv dimêm kan sh’ra grande. Pi kousé k’y’arrive ?


Mwé itou, sh’tonb an amour avek ein Wéyajeur. Mé ô mwein, kan y parre, on li pâ lessi par nouzôt mêm, a kouze ki lâ an mass pluss di faméye, ke l’ava mouvi alantour dju forre.


Le forre ashette dju blédeinde, di patatte, dju pwèsson, dju ri sâvaj pi d’la vyand frésh kon shass.


Y nô danne di krédji pour sâ, pi on li dipans sur di z’aferre kom di kouvarchur, di bonne si, dju bon ti forre pi dju suk. Pi, fô pâ oubliyi la shass ô boflô !


Franswè, vâ chèki nô trap. Sa lâ bezwein di kuk lyève pour soupi.


Sh’ti dji ki li tan d’alli a shass d’ôtonne. Lâ kizman fini toutte nô risarv. Enne bonne shans ke mon Jacques li r’vnu back an vi d’son premyé grô wéyaj.


Y vâ êt kapab ferre la shass. Spâ lwi ke tchire li myeu mé, li bon su ein sh’fal, mon Jacques. J’emme myeu l’werre a sh’fal ke dan ein kanou.


Si kwè ke fô ferre pour êt pra pour la shass ? Ma dimandi a mi wèzein Nacoda si y l’ava vu di boflô.


Ohh Angélique, oubli pâ d’alli sharshi li leinj sal ô forre. Shé ke ja dji ke va mouyi, mé, sa peu li lavi pandan ksa mouye pi li z’itande pour chessi kan sa vâ arrêti.


Krimme, j’ava oubliyi ki fô k’jaye nitwèyi ô forre.


Bonyenne shu fachigi. Di fwé, sa m’fa ryein ke l’iverre s’an vyein. Ô mwein, j’dorre ein pchi brein pluss s’tan -lâ, pi sa lâ l’tan di swerre.


Pi la rikolt lita pâ pire s’t’anni ; sa lâ assi krédji pour ashti notte ti… Tchu r’vyeindra back pandan li fêt pi sa prandrâ enne tass ansanb.

retour.png

L'histoire du bison

Autrefois, les bisons se déplaçaient librement dans les prairies de l’Ouest, mais des créatures à deux pattes sont venues les chasser. Ces chasseurs étaient si efficaces que le chemin de fer et les fusils les ont privés de leur prairie. De nos jours, les bisons vivent dans des fermes en espérant pouvoir s’en échapper un jour!

03-Bison-2.png

Vous trouverez l’histoire du bison vers l’est, à côté du fort Gibraltar. En partant de la porte d’entrée du fort (dos aux portes), avancez vers la gauche, mais ne tournez pas par le coin du fort. Dirigez votre appareil vers le champ ouvert.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Les prairies ont soutenu de riches écosystèmes diversifiés pendant des milliers d’années. Caractérisées par des herbes hautes, des touffes d’arbustes et de fleurs sauvages de couleurs éclatantes jaune et orange, les plaines septentrionales accueillaient une diversité d’animaux et de groupes humains. Le principal habitant des lieux était le bison d’Amérique, aussi appelé buffalo par les premiers explorateurs européens qui les ont aperçus et les communautés autochtones d’aujourd’hui. Avant la réintroduction des chevaux par les Espagnols, les Autochtones des plaines chassaient le bison avec l’aide de chiens de chasse qui rassemblaient les bisons et les dirigeaient vers des falaises appelées précipices à bisons. Après la réintroduction des chevaux, toutefois, et leur réorientation vers l’agriculture, ces groupes ont adopté une stratégie saisonnière hybride en profitant de la mentalité grégaire de leurs montures pour chasser le bison à cheval avec un arc et des flèches, une lance et, finalement, une arme à feu.
 
Le bison fournissait presque tout ce dont avait besoin une communauté autochtone. Les peaux étaient tannées à la cervelle pour la confection des vêtements, des costumes et des tipis. Les os pouvaient être évidés et transformés en outils comme les fléchettes, les grattoirs et les outils agricoles tels que des houes. Plus important encore pour le commerce des fourrures, la chair et la graisse des bisons servaient à préparer du pemmican. Nous y reviendrons. Presque toutes les communautés autochtones des plaines, comme la confédération des Pieds-Noirs, les Mandan, les Nehiyâw (Cris des plaines) et l’Oceti Sakowin (connus aussi sous le nom de Grande Nation Sioux, composée des Dakota, des Lakota et des Nacoda) tenaient le bison en haute estime pour sa capacité de soutenir la vie. Les bisons ont été chassés en très grand nombre et honorés dans des cérémonies telles que la danse du soleil. Au moment où d’autres nations autochtones comme les Anishinaabe sont arrivées dans les plaines à la fin du XVIIIᵉ siècle et au début du XIXᵉ siècle, elles ont aussi gravité autour de la chasse au bison et participé à la production de pemmican.
 
Le mot cri « pimikân », qui signifie « fait de graisse », décrivait non seulement un aliment, mais aussi son mode de préparation. Bien qu’on puisse préparer du pemmican avec n’importe quelle combinaison de protéine animale et de graisse, on le produisait surtout avec la chair et la graisse de bison dans le contexte du commerce des fourrures des prairies.
 
Bien que les Premières Nations aient chassé le bison pour nourrir et habiller leurs familles et enrichir leur commerce avec d’autres nations, la chasse au bison emblématique des Métis a porté ce mode de vie à un autre niveau. En appliquant des tactiques guerrières et une hiérarchie stricte fondée sur l’expérience, ces derniers se déplaçaient à cheval au milieu des troupeaux de bisons et tuaient des centaines d’animaux en une seule sortie. Selon Peter Erasmus, auteur et observateur métis, les chasseurs sciaient parfois le canon de leur mousquet, crachaient une balle dans le canon du fusil et tiraient sur les animaux qui avaient les plus grosses bosses en sachant qu’ils donneraient plus de pemmican, tout en suivant à cheval l’allure des bisons. Erasmus a également observé que certaines Métisses participaient aussi à la chasse et étaient de bonnes tireuses. Les chasses avaient généralement lieu au printemps et à l’automne et servaient à approvisionner les entreprises de traite des fourrures, et même plus tard le gouvernement colonial britannique, qui pouvaient ainsi préparer des conserves pour leurs employés et leurs soldats.
 
Après la chasse, on dépeçait les animaux, puis on découpait la chair en minces lanières qu’on mettait à sécher sur un feu ou au soleil. On faisait fondre la graisse trouvée autour des organes et dans les longs os, afin de la liquéfier. Une fois la viande séchée, on la broyait jusqu’à la consistance du bran de scie, en vue de la mélanger avec la graisse dans une proportion de 60 % de viande. On entreposait ensuite le produit final dans des sacs en peau qui pesaient environ 60 livres chacun. Il arrivait parfois que les Premières Nations et les Métis ne préparent pas de pemmican, mais vendent plutôt les ingrédients à la Compagnie du Nord-Ouest (CN-O). Cette dernière demandait ensuite à ses employés de préparer le pemmican eux-mêmes. On appelait parfois le produit final du « pemmican grossier ». Le pemmican préparé par et pour les Premières Nations avait tendance à être de qualité supérieure et pouvait contenir des baies séchées, de la moelle, du sang et d’autres ingrédients qui en amélioraient le goût. On appelait parfois ce produit final du « pemmican fin ». On consommait l’aliment tel quel ou on l’utilisait comme base pour un ragoût (appelé « rubbaboo »), une soupe ou du pain.
 
Le commerce du pemmican a permis aux entreprises de traite des fourrures de survivre, mais il a aussi provoqué des conflits et entraîné de la violence. En 1812, lord Selkirk, un philanthrope écossais et actionnaire de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH), recevait une subvention pour l’achat d’un terrain à proximité de La Fourche, afin de relocaliser des colons écossais et irlandais dépossédés. Il ne comprit pas entièrement l’incidence de l’afflux de colons sur la collectivité existante centrée sur le commerce des fourrures et composée de citoyens (engagés à la retraite), de Métis et de membres des Premières Nations, notamment d’Anishinaabe. Bien qu’elle ait d’abord offert son soutien aux colons dans le besoin, la CN-O en a finalement eu assez de leur présence et du fait qu’ils profitaient des ressources de la colonie de la rivière Rouge. CN-O. Lorsque Miles MacDonell de la CBH a adopté la « Proclamation sur le pemmican » en 1814, qui interdisait l’exportation de marchandises de la colonie et la chasse au bison à cheval, la CN-O a vraiment mal réagi. La CN-O et les Métis, ses alliés sur le territoire, ont totalement ignoré la proclamation et refusé de reconnaître l’autorité de la charte de la CBH. Ils ont poursuivi leurs activités comme d’habitude, ce qui a mené à des conflits : des entrepôts de pemmican des forts ont été vidés, des cultures ont été détruites et des maisons ont été incendiées. Après que le conflit ait culminé à la bataille de la Grenouillère en 1816, la colonie initiale a été dissoute et lord Selkirk s’est lui-même rendu à la rivière Rouge en 1817, en vue de négocier le « traité sur le tabac » avec le chef Peguis et plusieurs autres chefs autochtones. Selon ce traité, les Autochtones possédaient le titre des terres où les nouveaux colons pouvaient construire leur maison. Pour les Anishinaabe, cela signifiait le maintien de relations fructueuses avec des alliés militaires potentiels. Malgré la fusion de la CN-O et de la CBH en 1821, les Métis et des Premières Nations, comme les Nehiyâw et les Anishinaabe, étaient en mesure d’exercer un pouvoir économique incroyable en maintenant leurs chasses au bison semestrielles et en transformant des centaines d’animaux en milliers de livres de pemmican.

EN FRANÇAIS

Chapitre 03.png

EN MÉTCHIF

Venez ici, mes petits bisons! Venez écouter l’histoire de mémère Bison. C’est pas juste une histoire; c’est notre histoire. L’histoire des bisons.


Il y a longtemps, longtemps, les champs étaient pleins de bisons. Des milliers, même des millions de bisons!


Des fois, on venait nous chasser avec des bâtons pi des roches pointues. Ils chassent pour vivre, les deux-pattes. Mais ils sont respectueux.


Ils disent merci. Pi y nous apprécient. Si c’était pas eux autres, ce serait les loups et les ours, vous savez.


Mais les loups y ont pas de fusils… les fusils ont rendu la chasse un peu trop facile.


Pis là, c’est pas juste pour vivre, c’est pour faire de l’argent. Ils nous vendent comme du pemmican!


[On entend le son d’un train] Oh, entendez-vous ça? C’est le train. Et pi, la voie ferrée, c’est le début de la fin pour les bisons.


Aie, j’ai pas dit que c’était une belle histoire! Mais c’est notre histoire. C’est un monstre ces machines qu’on appelle des « trains ».


Les êtres à deux pattes crient : Get off the track! Pourquoi faire? C’est la prairie. C’est notre prairie. Mais, y’ en a de plus en plus d’eux autres à deux pattes.


Pis astheure, ils peuvent s’asseoir confortablement dans leur train et nous tirer avec leur fusil! Pire que ça, y’ont du fun à faire ça!


J’achève presque mon histoire. L’agriculture! Avec l’aide des chevaux, les deux-pattes ont labouré les champs pi y’on détruit l’herbe naturelle qu’on mangeait.


Répondez-moi ça : Si tous les bisons ont disparu, comment est-ce que moi, vous les petits, vos papas pis vos mamans, on existe aujourd’hui?


Ben, on vit sur une ferme maintenant. J’sais, c’est pas la liberté comme dans le temps, mais on a de quoi à manger pi à boire…


Pi, à toutes les fois qu’on a la chance, on casse les clôtures! (son de sabots de bisons qui courent)

V’ni isitte, mi pchi boflô! V’ni ikouti l’istwerre di memérre Boflô.


Spâ yeink ein istwerre; si notte istwerre, l’istwerre di boflô.


Y lâ bein, bein lontan, li shan l’ita plein di boflô. Di milyé pi di milyé pi mêm di milyon di boflô! Di fwè, sa v’na nô shassi avek di bâton pi di rosh pweinchu.


Li deu pat y shass pour vive. Pi y l’ava dju respa. Y djize marsi. Pi y nô z’emme.


Si sta pâ d’izôt, sa s’ra li lou, tsé. Mé, li lou pi li z’ours l’on pâ d’fizi… li fizi la randju la shass ein pchi brein trô fasil.


Pi lâ, spâ jusse pour viv, s’pour ferre d’l’arjan. Sa nô van kom dju pemmikan!


Ohh, sa l’antan tchu sâ? Si l’trein. Ipi, la trak, si la fein dju boflô ke komans.


Eille, jâ pâ dji ke sta enne belle istwerre! Mé, si notte istwerre. Si mashinne-lâ ksa l’appel di « trein », l’ita di monstre.


Liz’êt a deu-pattes y djize : « Ôti-vô d’la trak! » Pourkwè? Si notte préri. Mé, y n’â bein pluss d’izôt a deu patte.


Pi asteur, sa peu s’assir bein konfortab dan leu trein pi chirri su nouzôt avek leu fizi. Pi l’pire, si k’y’onva dju fonne a ferre sâ.


Ja kizman fini mon istwerre. L’agrikulchur! Li deu-patte l’onva labouri leu shan avek l’éde di sh’fal pi sa lâ ditrwi l’erb nachurel ke nouzôt sa manja.


Wè. Si trisse.


(A ri) Sa lâ pâ r’marki! Danni mwé enne ripons a sâ : Si toutte li boflô lâ djisparu, koman sa s’fa ke mwé, vouzôt li pchi,


vô papa pi vô Mâman sa ixiste ankorre ojordjwi? Bein asteur, sa vi su enne farme. Shé, spâ êt libe kom avan mé, sa lâ kechôze a manji pi a bwerre…


Pi, shak fwè ksa peu, sa kâsse la klôchur.

retour.png

Festival du Voyageur — une histoire d'amour
avec la soupe aux pois

Profitez de la joie de vivre du Festival du Voyageur! C’est une célébration annuelle des cultures canadienne-française et métisse au fort Gibraltar. Venez goûter à la musique, à la danse, aux sculptures sur neige, à d’excellents plats et à tout ce que la culture métisse francophone a à offrir!

04-Festival-2.png

Placez-vous à environ 10 à 20 mètres des portes d’entrée du fort Gibraltar. Regardez tout au tour de vous pour observer une histoire d’amour avec la soupe aux pois, à 360 degrés.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Le concept d’un festival hivernal qui célèbre les francophones du Manitoba a germé en 1967 dans l’esprit quelques braves citoyens de Saint-Boniface qui s’étaient réunis sous la bannière de la Chambre de commerce de Saint-Boniface. Ils ont présenté à la Ville de Saint-Boniface un plan qui, espéraient-ils, leur permettrait d’obtenir un soutien financier. L’offre proposée par la Ville ne suffisait malheureusement pas à réaliser une idée aussi ambitieuse. Ils allaient devoir attendre.

L’année suivante, les organisateurs se sont de nouveau adressés à la Ville, mais cette fois avec l’appui de 18 organismes communautaires variés. La Ville a approuvé entièrement le plan proposé et le premier Festival du voyageur a eu lieu en 1970, dans le contexte des célébrations officielles du centenaire du Manitoba.

On avait confié la promotion du Festival à Georges Forest, lequel était déterminé à en faire une grande réussite, au point que ce propriétaire d’une petite entreprise, ainsi que son épouse Anita, ont choisi de le promouvoir eux-mêmes partout où ils allaient, habillés comme le célèbre couple de voyageurs formé par Jean-Baptiste Lagimodière et Marie-Anne Gaboury. Ils se présentèrent à toutes les stations de radio et de télévision, discutèrent avec tous les journalistes de la presse écrite, se déplacèrent pour assister à d’autres célébrations aussi loin que dans le Midwest américain et au Québec, posèrent pour d’innombrables photos et firent même leur épicerie en portant leurs costumes d’époque. L’apparence emblématique du voyageur et les efforts de promotion du nouveau festival par Georges Forest firent en sorte qu’il fut le premier Voyageur officiel du Festival, créant ainsi une tradition qui s’est maintenue jusqu’à aujourd’hui.

Les célébrations durèrent pendant quatre jours, du 26 février au 1ᵉʳ mars 1970. La communauté francophone de Saint-Boniface mobilisa plus de 4 000 bénévoles et lança une fête hivernale. Plus de 70 000 personnes participèrent aux festivités qui comprenaient un bal costumé, des courses en raquettes, des glissoires géantes, sans oublier les danses, la musique et les mets traditionnels en abondance.

Comme le veut la devise des voyageurs d’autrefois, le Festival a persévéré et a même prospéré en enrichissant sa programmation avec l’ajout d’une compétition internationale de sculpture sur neige, de plus de cent spectacles musicaux dans des tentes chauffées, de la reconstruction du fort Gibraltar et du poste de traite de la Compagnie du Nord-Ouest (CNO), et d’un concours renommé de violon et de gigue traditionnels qui continue de rassembler les gens le long des rives gelées de la rivière Rouge.

EN FRANÇAIS

Chapitre 04.jpg

EN MÉTCHIF

C’est le centenaire du Manitoba et le lancement de la nouvelle fête d’hiver, le Festival du Voyageur.


On s’est fait recruter, les étudiants du Collège de Saint-Boniface, pour construire un immense palais de glace au parc Provencher.


À soir, je sers de la soupe aux pois et puis de la tourtière dans un petit kiosque.


Mes doigts sont brûlés… pi mes pieds sont gelés!


Mais, ma meilleure amie du Collège a dit : « Arrête de chialer! Fais une p’tite gigue pour te réchauffer ».


Tout à coup, j’sens une main qui m’accroche le bras pi qui me tire vers un stand où les musiciens s’installent.


« J’ai trouvé votre gigueuse », annonce le gars à la grosse barbe qui m’a traîné jusqu’ici. « Elle a toute une joie de vivre, celle-là! »


Tout le monde m’applaudit pour mon courage. J’vois le rire dans les yeux pétillants du barbu. « Ah non, mon jeune barbu!


Si tu penses que tu vas juste rester debout… là… je gigue moi, et toi aussi tu vas danser! »


J’lui tiens la main si serrée que nos pas prennent le même rythme.
Suite à notre démonstration essoufflante, le violon joue le nouvel air du Festival, accompagné des paroles de la chanson : « Voyageur vas faire tes bagages, c’est à l’aube que nous partirons! » (applaudissements de la foule)


Je retourne servir ma soupe et mes tourtières.


« Y’était à peu près temps qu’ils organisent un festival pour fêter en français. »


Il m’achète un verre de caribou pi on trinque au son du violon : « À notre festival! ».

Si l’santnerre dju Manitoba pi l’komansman dju Feschiival dju Wéyajeur, la novel fêt diverre.

Li z‘ichudjyan dju Kâléj Saint-Boniface lon iti d’mandi d’bâchirre ein gro palla di glass dan l’Park Prâvanshi.

Aswerre, ma sarvir d’la soupe ô pwâ pi d’la tourkyerre dan enne pchitte bouchik.

Mi dwè sonta bruli pi mi pyé sonta jli!

Mon ami, a m’dji:

Arrêt di shyâli! Fa enne pchitte jig pour ti rishoffi.

D’ein kou, j’file enne mein ke m’pâgne li brâ, pi ke m’chirre a enne estrad divou kli musichyein y s’einstalé.

Ein gâ avek enne grosse barbe, y m’trenne juskisitte, pi y dji : « Ja trouvi votte jigeuze. A lâ bein d’la vi selsitte ! »

Kan sh’t’arrivi su l’estrad, toulmond klaka di mein paske sh’ta kourajeuze.

J’vwè l’rire dju barbu dan sé zyeu ke péchéye.

« Ah non, mon jenne barbu ! Si tchu pans ke chu vâ resti diboutte-lâ… J’jig, saffek twé itou, tchu vâ dansi ! »

Apra notte spektak a koupi l’souf, l’vyâlon y jou la novel shanson dju Feschival :

Voyageur, va faire tes bagages, c’est à l’aube que nous partirons.

J’r’tourne sarvir ma soupe pi mi tourkyerre.

Y m’dji : « Sta bein l’tan d’ârganizi ein feschival pour féti an fransa. » Mwé itou.

Y mashette ein verre di karibou pi, ô son dju vyâlon, on treink : « A notte feschival! »

retour.png

Sœur Docteure

Les Sœurs Grises occupaient plusieurs emplois au couvent. Elles étaient enseignantes, cuisinières, infirmières et, plus important encore, médecins. Sœur Sainte-Thérèse était l’une des meilleures « docteures » du couvent des Sœurs Grises de Saint-Boniface. Elle leur avait été prêtée par le couvent d’Ottawa en présumant qu’elle y retournerait un jour.

05-GreyNuns.png

En avant du Musée de Saint-Boniface. Postez-vous à environ 20 mètres du musée et pointez l’appareil directement vers le bâtiment.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Teresa McDonell est née à St. Andrews au Haut-Canada en février 1833 ou 1835. Sa mère décède en lui donnant naissance, et c’est une tante qui l’élève avant de l’envoyer très jeune au couvent des Sœurs de la Charité (Sœurs Grises) de Bytown. Une fois à l’âge adulte, elle fait part de son désir de devenir religieuse. Furieux de cette décision, son père Angus McDonell la déshérite. Le 19 mars 1853, elle prononce ses vœux et adopte le nom de sœur Sainte-Thérèse. Deux ans plus tard, accompagnée d’une autre membre de sa congrégation, elle est « prêtée » à la mission de la rivière Rouge des Sœurs Grises de Montréal. Arrivée au couvent de Saint-Boniface en octobre 1855, on lui confie immédiatement la gestion de la pharmacie en plus de son rôle d’enseignante. Sa gentillesse et sa volonté d’aider les gens dans le besoin de l’ensemble de la colonie sont alors reconnues par de nombreuses personnes qui commencent très tôt à l’appeler « sœur Docteure », parce qu’elle est particulièrement douée pour s’occuper des malades.
 
À la fin de son séjour de trois ans, on lui demande de retourner à Bytown, mais les résidents de la Colonie de la Rivière-Rouge soulèvent de nombreuses objections. Le 29 août 1859, elle prend place dans une charrette de la rivière Rouge en compagnie d’une consœur, pour rejoindre un « convoi » plus important qui doit les amener plus au sud, à St. Paul au Minnesota, d’où elles doivent se diriger vers Bytown. Toutefois, le lendemain, un groupe de cavaliers métis dirigé par Louis Riel père rattrape le « convoi » de charrettes et ordonne à sœur Sainte-Thérèse de monter sur une autre charrette à titre de « prisonnière ». Elle est escortée en triomphe jusqu’au couvent de Saint-Boniface. Face à une telle manifestation d’opposition, ses supérieures lui permettent de demeurer à la rivière Rouge. À titre d’enseignante, elle participe à la fondation de la St. Mary’s Academy et exerce à divers moments la fonction de mère supérieure des couvents de Saint-Norbert, de Saint-François-Xavier et de Saint-Vital. Elle demeure également active dans le secteur des soins de santé en établissant un hôpital temporaire dans le couvent de Saint-Boniface en 1871. Après avoir contracté deux fois un érésipèle, une grave infection cutanée, elle restera confinée à l’infirmerie pour les seize dernières années de sa vie, avant de décéder le 4 novembre 1917.

EN FRANÇAIS

Chapitre 05.jpg

EN MÉTCHIF

C’est mon travail d’apporter des serviettes propres à l’infirmerie du couvent.

En rentrant, j’entends sœur Docteure qui dit : « Vite, apporte-les ici! »

Je me dépêche d’apporter les serviettes et, à ma grande surprise, sœur Docteure pointe à la tête de l’homme et me dit :

Appuie de toute ta force pour arrêter le sang pendant que je couds.

Je fais ce qu’elle me dit et bientôt le sang s’arrête, et l’homme respire calmement. Ça paraît sur son visage qu’il a un mal de tête effrayant.

(En michif) Ma pripari ein ti avek d’l’ikors di sôl rouj.

Je cours comme un lapin vers la cuisine. À mon retour, sœur Docteure est occupée avec un autre patient, puis elle me fait signe d’aider l’homme encore trop faible pour tenir la tasse.

 — Comment est-ce que tu sais ce qui aide les migraines?

 — Ma mémère m’amène avec elle ramasser des plantes pi des herbes.

 — Estelle, est-ce que tu aimes la vie du couvent?

 — Ah oui, je veux être une Sœur Grise, mais j’veux pas être une maîtresse d’école. Je pense que je serais bonne dans la cuisine comme sœur Laurent.

 — Aimerais-tu aider à l’infirmerie? 

 — Ah oui, mon plus grand rêve, ça l’était de prendre soin des malades.

Le lendemain pi le jour après pi les semaines après ça, sœur Docteure m’enseigne toutes sortes de choses. Des fois, elle me dit : « Écoute bien, regarde bien. C’est important que tu te rappelles de ceci quand je serai plus là ».

 — Ça part? 

 — Oui, je rentre au couvent à Ottawa.

Mais ma sœur! Cossé que les familles Méchifs vont faire sans leur sœur Docteure?

Le lendemain, mon père, ma mère et les Riel se rendent au couvent pour protester le départ de sœur Docteure. D’une voix sévère, la mère supérieure coupe court à leurs supplications :

« Sœur Sainte-Thérèse nous a été prêtée par son ordre religieux d’Ottawa pour trois ans. Il n’y a rien que je puisse faire pour la garder ici. Elle partira demain matin pour l’Est. »

Le lendemain matin, un Métis en charrette arrive au couvent pour chercher sœur Docteure et son petit sac de voyage.

Toutes les sœurs, les élèves et les travailleurs du couvent sont réunis pour lui faire leurs adieux.

Elle me cherche dans la foule pi je m’avance vers elle pour prendre sa valise.

Je l’accompagne jusqu’à la charrette, je salue le charretier qui m’a l’air familier.

Avant de monter, elle met la main dans la poche volumineuse de son manteau pi sort un chapelet noir qu’elle me donne.

« Tu prieras pour nous deux à l’intention de nos malades. Et je prie pour que j’aie de la patience pendant ce long voyage à Ottawa en train. »

Le lendemain après-midi, je vois une scène surprenante par la fenêtre d’en haut du couvent.

C’est la mère supérieure qui court avec ses jupes qui tourbillonnent autour d’elle comme une toupie.

Elle arrive à la charrette juste comme le charretier aide sœur Docteure à descendre.

C’est le charretier qui s’adresse à la mère supérieure : « Sur le chemin qui mène à St-Paul, un groupe de Méchis est venu contourner notre charrette et nous a obligés à rebrousser chemin vers Saint-Boniface ». C’était un gros groupe qui y’était pas de bonne humeur. J’avais pas le choix. Je vois sœur Docteure qui hoche la tête pour confirmer l’histoire du charretier. La sœur supérieure semble enfin comprendre que l’expérience a été bouleversante pour sa collègue.

Elle prend la valise et les deux religieuses marchent ensemble vers le couvent. Avant de partir, le charretier lève le regard vers la fenêtre où je suis, pi me fait un grand salut.

Je l’avais pas reconnu sans le bandage sur sa tête! C’est l’homme à qui sœur Docteure (pi moi!) on avait sauvé la vie il y a quelques mois.

Mon cœur chante. Merci d’avoir ramené sœur Docteure aux Méchifs.

Li ma job d’amni di sarvyette prop a l’einfirmri dju kouvan. Kan jâ rantri, j’antan Seur Dokteur ke dji : Vitte amenne-li isitte!


J’m’grouye pour amni li sarvyette pi sh’ta bein supri kan Seur Dokteur a pweinte a la têt d’l’omme pi a m’dji : Ma toutte ta fors pour arrêti l’san pandan ke j’kou.


Sh’fa kousé ka m’dji pi, dan pâ gran tan, l’san y’arrêt pi l’omme y respir bein kalm. Sa para su sa fasse kyâ ein gro mal di têt. Ma pripari ein ti avek d’l’ikors di sôl rouj.


J’kour a kwizinne kom ein lyève. Kan jâ r’vyein back, Seur Dokteur li âkupi avek ein ôt pasyan. A m’fa ségne d’édi l’omme ki l’ita pâ assi forre ankorre pour tchyeinde sa tâsse.


Avan ke j’sorre d’l’einfirmri, Seur Dokteur a m’arrêt. Koman tchu sé kousé k’yéd di migrenne?


Ma memérre m’amenne avek elle ramâssi di plante pi di z’erb.


Estelle, l’emme tchu la vie dju kouvan?


Ah wè, j’veu êt enne Seur Grize. Mé j’veu pâ êt enne mitresse d’ikol. J’pans ke sh’ra bonne dan kwizinne kom Seur Laurent.


L’landmein, pi l’jour pi li s’menne apra, Seur Dokteur a m’mont toutte sorte d’aferre. Di fwè, a m’dji : Ikoutte bein pi r’gord bein.


Ein jour, a s’arrêt : S’teinportan ke tchu t’rappel ditsâ-sitte kan sh’râ pu isitte. Sa parre? Wè, j’rant ô kouvan a Ottawa.


Mé ma Seur! Kousé kli faméye méchisse von ferre san leu Seur Dokteur?


Li landmein, mon pérre, ma mérre pi li Riel y von ô kouvan pour montri ke sonta pâ kontan ke Seur Dokteur a parre.


Avek enne vwè bein siverre, la Mérre Supirieur a l’arrêt toutte leu d’mand: Seur Sainte-Thérèze nouza iti prèti pour twâ z’anni par sa kongrigasyon d’Ottawa.


Sh’peu pâ ryein ferre pour la gardi isitte. A vâ parchir d’mein matein pour alli dan l’Esse.


L’landmein matein, ein Méchisse an sharette arrive ô kouvan pour sharshi Seur Dokteur pi son pchi sak di wéyaj.


Toute li Seur, sonta lâ pour y djirre bobye.


A m’sharsh dan l’group pi j’vâ a elle pour prande sa valize.


J’vâ avek elle juska sharette pi j’dji allo a selwi ke menne la sharette. Sh’file kom si j’l’konna.


Avant ka mont, a ma la mein dan la grosse posh di son mantô, pi a sorre ein shapla nwerre ka m’danne.


Tchu prirâ pour nouzôt deux pour nô malad. Pi pri pour ke j’éye d’la pasians pandan ste gran wéyaj an trein a Ottawa.


Jy r’gorde la sharette ke s’an vâ, pour alli s’plassi a fein d’la ligni di sharette.
L’landmein apra-midji, jwè kéchose par l’shâssi dju hô dju kouvan, ke mâ supri. Si la Mérre Supirieur ke kour avek si jupe ke tourn alantour d’elle kom enne toupi.


A l’arrive a sharette an mêm tan ke selwi ke menne la sharette, éde la Seur Dokteur a disand.


Si lwi ke parl a Mérre Supirieur.


Su l’shmein ke menne a Saint-Paul, ein group di Méchisse l’ava r’viri notte sharette di barre, pi noza forsi a r’vyeind back a Saint-Boniface.


Sta ein gro group ke l’ita pâ kontan. J’ava pâ d’shwè.


J’wè Seur Dokteur ke kante la têt pour djirre ke son istwerre l’ita vra. La Seur Supirieur a konpran finalman ke s’t’enne ixpirians ky l’ava iti toff pour elle.


A pran la valize pi li deu, sa marsh ansanb divou kyé l’kouvan. Avan di parchir, selwi ke menne la sharette y r’gord ô shâssi divou ke shu, pi y m’fa ein gran salu.


J’la pâ r’konnu san son pansman sua têt. Sta l’omme ke Seur Dokteur, pi Mwé, l’ava sôvi sa vi ya kuk mwâ.


Mon keurre y shant. Marsi d’awerre ramni la Seur Dokteurô Méchisse.

retour.png

Une histoire vécue sous le double signe
de la fierté et de l'humilité

Ici, nous examinons les deux drapeaux de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba. Dès sa fondation, l’organisme a répondu au besoin d’affirmer la présence des Métis francophones. Écoutez la musique du violoniste Alexandre Tétrault et lisez leur histoire.

Chapitre 06.jpg

En entrant par le portail du Musée de Saint-Boniface, tournez à gauche et placez-vous face à la Statue de Louis Riel. La statue est située du côté nord de la cour avant.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Article de Bernard Bocquel sur les événements qui ont mené à la création et la perpétuation de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba, photos historiques de la famille et des amis de Louis Riel. 


Bref survol de l’histoire de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba - Une histoire vécue teintée à la fois de la fierté et de l’humilité métisse


Évoquer en quelques minutes les 135 ans d’existence de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba, c’est possible, mais uniquement en acceptant de mettre en valeur les contributions de certaines personnalités à des moments charnières de l’histoire si riche en événements de notre association.

Dès sa fondation, l’Union répondait au besoin d’affirmation des Métis canadiens-français, eux dont la contribution à la fondation de la province du Manitoba avait été déterminante en 1870. En ce temps-là, la meilleure façon de manifester sa force sociale et de préserver son influence était de former une organisation.

Il faut savoir que l’Église catholique jouait un rôle très important à cette époque. Monseigneur Taché, l’archevêque de Saint-Boniface, était très respecté. Il voulait que lesMétis adoptent le saint patron des Canadiens français comme leur saint patron. Mais les Métis ne s’identifiaient pas à saint Jean-Baptiste. Ils voulaient se mettre sous la protection de saint Joseph.

On a tenu compte de leur désir en 1884, au moment des troubles dans le Nord-Ouest. Les Métis ont alors obtenu le droit de célébrer sous le patronage de saint Joseph.

Après le traumatisme de la pendaison de Louis Riel survenue le 16 novembre 1885, l’élite métisse du Manitoba était bien décidée à garder vivante la mémoire calomniée de leur chef.

C’est pourquoi, dès l’été 1887, un groupe resté fidèle à Riel a profité de ce moment de l’année où se tenaient les grands pique-niques pour fonder une association métisse, bien sûr placée sous le patronage de saint Joseph.

Pendant la vingtaine d’années qui a suivi, des personnalités comme Simon St-Germain et Martin Jérôme ont veillé à assurer un certain poids politique aux Métis, ce qu’ils ont pu réaliser en s’appuyant sur l’Union métisse Saint-Joseph.

À la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, le grand événement social annuel des Métis, le pique-nique, était une fête autant patriotique que religieuse, qui consistait à célébrer notre particularité comme Métis. Ce rituel d’affirmation est devenu plus concret en 1906, lorsque l’Union a érigé un monument à Saint-Norbert, à l’endroit précis où les résistants de 1869 avaient dressé une barrière pour empêcher l’entrée des représentants du Canada à la Colonie de la Rivière-Rouge.

Mais cette grande première, ce premier geste public fort associé à Louis Riel, n’était considéré que comme un premier pas. Les Métis politiquement engagés voulaient mieux s’organiser. Ils voulaient que les Métis soient plus présents dans la société manitobaine.

Ce grand moment est arrivé en 1910, quand Roger Goulet, éducateur hautement respecté, a pris la tête de l’Union métisse Saint-Joseph. Le fils du martyr Elzéar Goulet est autant respecté par les Métis anglophones que par les Canadiens français. Roger Goulet et ses supporteurs se donnent comme ambition de soutenir leurs frères et sœurs métis partout dans la province.

C’est pour cette raison louable qu’on a ajouté l’adjectif « national » au nom de l’association. Dorénavant, on parlera de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba.

Malheureusement, les bonnes volontés ne suffisent pas à changer les choses durant une période où l’économie est en crise et où l’argent manque. Un malheur supplémentaire vient ruiner tous les espoirs de lancement d’une nouvelle dynamique nationale : la guerre mondiale déclenchée en 1914. À la fin de la guerre, on se limite surtout à assurer la survie de l’organisation. Le défi est de taille, car les fondateurs sont maintenant âgés. Il faut absolument une relève.

Et là, on veut bien croire que les prières à saint Joseph des anciennes et des anciens sont entendues : le jeune professionnel Samuel Nault accepte de relever le défi. Tout au long des années 1920 et 1930, des années très difficiles sur le plan économique, il va se dévouer corps et âme à l’Union.

Non seulement la grande fête annuelle du pique-nique est maintenue, mais grâce à Samuel Nault, un projet extraordinaire finit par voir le jour en 1936. Il s’agit de la publication de l’histoire de la Nation métisse.

Une fois de plus, le groupe resté fidèle à Riel veut montrer que l’histoire officielle racontée dans les manuels scolaires n’est que de la propagande du gouvernement, un tissu de mensonges qui ne correspond pas à la réalité.

L’effort de longue haleine pour réhabiliter la mémoire de Louis Riel est de nouveau mis en suspens par la Deuxième Guerre mondiale, qui a commencé en 1939. À la fin de la guerre en 1945, l’Union doit à nouveau faire face à un grave problème de direction, car entre temps, Samuel Nault est décédé accidentellement. Les anciens, comme Roger Goulet, Guillaume Charette ou Camille Teillet sont maintenant bien trop âgés pour relancer l’organisation.

Heureusement, grâce à l’aide du prêtre et historien Antoine d’Eschambault, l’Union nationale métisse Saint-Joseph reprend vie en 1951. Le curé de Saint-Émile fait appel aux familles qui fréquentent sa paroisse pour trouver des meneurs. Il faut, à ce stade de la déjà longue histoire de l’Union, saluer l’engagement de la famille Bruce, en particulier d’Azarie Bruce et de son plus jeune frère Jos Bruce.

En outre, dans les années 1950 et 1960, les femmes commencent à devenir plus actives sur la scène publique, comme Yolande Schick, la fille de Camille Teillet. Une autre fille d’anciens, Ida Carrière née St-Germain, a été un pilier de l’organisation pendant bien des décennies, mais en coulisses. Dans les années 1960, le monde change. L’ancienne tradition des pique-niques ne résiste pas à la modernité.

Toutefois, l’Union garde toute sa raison d’être. Lorsque Jean Allard prend la présidence en 1965, c’est avec un objectif bien précis en tête : il veut qu’on reconnaisse officiellement le rôle de Louis Riel comme père du Manitoba dans le cadre du centenaire de la province, en 1970. Il atteint son objectif en 1971, avec l’érection si controversée de la statue de Marcien Lemay sur le terrain du Palais législatif. Celle-ci se trouve maintenant sur le campus de l’Université Saint-Boniface.
 

Chapitre 06.jpg

Cliquez sur l'icône pour écouter
La Gigue de la rivière Rouge
par Alexandre Tétrault
(Production TiBert et Douzie)

retour.png

La mort d’Elzéar Goulet — Telle que vue par un témoin situé à Saint-Boniface

Elzéar Goulet se rend au Red Saloon le 13 septembre 1870. Sur place, un résident le dénonce publiquement comme l’homme qui « a tué Thomas Scott ». Goulet est rapidement pris en chasse à l’extérieur du bar. Il tente de traverser la rivière Rouge à la nage jusqu’à ce qu’une pierre lancée par la foule le frappe à la tête et qu’il se noie.

07-ElzearGoulet-1.png

​Entrez par le côté ouest du cimetière de Saint-Boniface. Le premier ensemble de lampadaires du trottoir sera à quelques pas. Tenez-vous au milieu du trottoir entre les lampadaires, et faites face à la rivière.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Né le 18 novembre 1836 à Saint-Boniface, Elzéar Goulet est le fils d’Alexis Goulet et de Josephte Siveright. Le nom Goulet est important dans la Colonie de la Rivière-Rouge où l’un des ancêtres d’Elzéar avait accompagné le sieur de La Vérendrye pendant ses expéditions dans les prairies. Il est probable qu’Elzéar lui-même ait accompagné son père Alexis à plusieurs chasses au bison avant son mariage avec Hélène Jérôme, dit Saint-Matte, à Pembina où il s’est établi et est devenu citoyen américain. Il commence alors rapidement à transporter le courrier entre Pembina et la Colonie de la Rivière-Rouge. Il est bien vu et respecté par la population de la rivière Rouge.
 
À l’automne 1869, Elzéar se joint à Louis Riel qui dirige la résistance des Métis contre la tentative du gouvernement canadien d’assurer sa souveraineté sur les territoires de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH), et ce, sans consulter les résidents de la Colonie de la Rivière-Rouge sur l’incidence des changements administratifs sur les droits et les propriétés foncières de ces derniers. Nommé commandant militaire adjoint à l’adjudant général Ambroise D. Lépine, Goulet est l’un des jurés au procès de Thomas Scott, accusé de trahison contre le gouvernement provisoire. Il a aussi participé à l’exécution de Scott le 4 mars 1870. Bien que le destin de Scott ait eu un effet salutaire sur les autres opposant de la Colonie de la Rivière-Rouge au gouvernement provisoire, son exécution provoque une vague d’indignation en Ontario. Malgré le règlement négocié des problèmes entre le Canada et la Colonie de la Rivière-Rouge qui se traduit par l’adoption de la Loi de 1870 sur le Manitoba, et par des promesses de bonne volonté et d’amnistie générale du Canada, de nombreux volontaires ontariens membres de l’expédition militaire de Wolseley ne prisent guère la réconciliation. À l’arrivée de l’expédition le 24 août, Riel est forcé de s’exiler pendant que les volontaires peu disciplinés cherchent à se venger en attaquant quiconque est associé à ce qu’ils perçoivent comme une « rébellion » contre l’autorité impériale. Le 13 septembre 1870, Goulet se rend donc au Red Saloon dans ce qui est alors le petit village de Winnipeg, malgré les mises en garde. Un résident local informe des volontaires ontariens qui ne sont pas en service qu’Elzéar est l’homme « qui a tué Thomas Scott », et la chasse commence! Poursuivi par plusieurs hommes, Goulet fuit en direction de la rivière Rouge le long de ce qu’est aujourd’hui l’avenue Lombard. Alors qu’il tente de rejoindre la sécurité relative de Saint-Boniface à a nage, ses poursuivants lui lancent des pierres jusqu’à ce que l’une d’elles l’atteigne et qu’il se noie. Même si on connaît les coupables, aucune accusation n’est portée contre eux par crainte de ne pas pouvoir appliquer la loi, car les coupables auraient été soutenus par la force policière en place.
 
La mort impunie de Goulet n’est que l’un d’une série d’assauts, d’incendies de maisons, de meurtres et de viols qui ont été perpétrés par les vengeurs autoproclamés de Thomas Scott. Le « climat de terreur » qui a régné sur la Colonie de la Rivière-Rouge pendant les premières années était annonciateur de ce qui attendait le Manitoba dans les années à venir. La confusion et les innombrables délais relatifs à l’obtention des titres de propriété des fermes que les Métis occupaient déjà, ainsi qu’aux 1,4 million d’acres qui devaient censément être réservés à leurs enfants, laissèrent ceux-ci vulnérables à la fraude, à la frustration et aux spéculateurs fonciers sans scrupules. Bon nombre de Métis abandonnèrent leurs revendications et la nouvelle province, pour se diriger plus à l’ouest et même aux États-Unis.
 
Les gens qui avaient peuplé, construit et défendu la Colonie de la Rivière-Rouge pendant des générations ont vu leur droit d’aînesse passer aux mains des nouveaux arrivants dans la province qu’ils avaient créée.

EN FRANÇAIS

Chapitre 07.jpg

EN MÉTCHIF

Qu’est-ce qui se passe de l’autre côté de la rivière? Il y a un groupe de gens rassemblé. Ils ont pas de l’air contents… T’entends-tu ça?


C’est de l’anglais, je pense. Ben oui, c’est le côté de Winnipeg quand même.


Qu’est-ce qu’ils disent? Meurtrier? Oh non. Je pense qu’ils sont en train d’attaquer quelqu’un.


Pis c’est pas juste des hommes, il y a des femmes là-dedans. Coudonc, mais c’est Elzéar Goulet!


Regarde! Oh non, comment qu’il va se sauver?


Pourquoi qu’ils attaquent Elzéar? C’est des hommes de Wolseley.


Depuis notre gouvernement provisoire, ils cherchent leur revanche sur toutes les Métis associés à Louis.


Toutes les Métis ont peur ces jours-ci. Pis Elzéar pis toute la famille Goulet étaient fidèles à Louis. Cossé qu’il va faire?


Ah! Il saute dans la rivière. S’il peut juste se rendre de ce côté icitte, il va être correcte.


Viens t’en, Elzéar! Viens t’en! Il va le faire! Non, arrêtez! Arrêtez de lui lancer des roches! Viens t’en! Continue Elzéar! Viens t’en!


Oh, non. Il a reçu une roche sur la tête. Je pense que…


Ah non! Il est sous l’eau. Elzéar! Il va remonter, hein? Noooon! Ça peut pas finir comme ça!

Kousé ke s’pâsse l’ôt kôti d’la rivyerre? Y lâ bein dju mond ansanb pi l’ava pâ d’l’erre kontan. Lâ-tchu antandju sâ?


J’pans si d’l’angla. Bein wè, li su l’kôti d’Winnipeg kan mêm.


Kousé ki djize? Tueur ? Oh non. J’pans k’y’attak kekun. Pi spâ jusse di z’omme. Y lâ di famme dan l’group.


Bein koudon, si Élzéar Goulet. R’gorde, oh non, komantesse ke vâ si sôvi?


Pourkwè k’y’attak Elzéar? Bein wè, si di hommes de Wolsley. Depuis notre gouvernement provisoire y s’r’vanj su toutte li Méchisse k’ita avek Riel.


Toutte li Méchisse y l’on peur si jour-sitte. Pi Elzéar pi toutte la faméye Goulet l’ita fidel a Louis. Kousé ki vâ ferre?


Ah, y sôte dan la rivyerre. Si y peu jusse s’rand s’kôti-sitte, y vâ êt korrek. Vyein-tan, Elzéar! Vyein-tan! Y vâ y’arrivi!


Non! Non! Arrêti! Non, arrêti di garoshi di rosh! Ayoye! Ayoye! Kontchune Elzéar! Vyein-tan.


Ah non. Ya eu enne rosh sua têt. J’pans ke…

 

Non! Non! Yé antsour l’ô. Elzéar! Y va r’monti, ein? Noooon! Sa peu pâ finir kom sâ.

retour.png

Ka-peyak-waskonam (une flèche)

C’est le chef One Arrow (Une flèche) qui a signé le Traité N° 6 en 1876. Il avait la même mission que Louis Riel, soit la protection de son peuple et de ses droits. Il a été accusé de trahison contre le gouvernement canadien. (Information tirée d’un article de John Lagimodière dans Eagle Feather News)

08-One Arrow.png

​Cénotaphe du chef One Arrow dans le cimetière de Saint-Boniface. La sépulture du chef One Arrow est à quelques pas vers l’est de celle de Louis Riel. Tenez-vous face au mémorial en pierre, à environ 10 à 15 mètres.

CALEPIN HISTORIQUE

 

One Arrow est le chef d’une bande de Cris des saules dont la réserve est la plus rapprochée de la communauté métisse de Batoche. Fils d’un marchand de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) appelé George Sutherland et de sa seconde épouse Pasikuis, One Arrow est né vers 1815. Il est l’un des trois chefs qui s’opposent à la signature du Traité n° 6 au fort Carlton en 1876. À un moment donné durant les discussions, il enlève ses vêtements pour déclarer debout devant les commissaires, et 2 000 autres personnes :
 
« Je suis venu au monde tout nu, je n’avais rien alors, je n’ai rien aujourd’hui. Avant l’arrivée de l’homme blanc, nous avions le bison qui nous donnait de la nourriture, des vêtements et des tentes. Nous avions des petits fruits. Nous avions la protection du Grand Esprit. Vous êtes en train de nous enlever la vie. »
 
Bien qu’il signera le traité quelques jours plus tard, il établira sa bande sur la réserve désignée seulement après avoir tenté sans succès, en 1879, de trouver des bisons dans les collines du Cyprès. En 1882, en raison de son âge et de ses infirmités, One Arrow tente de démissionner comme chef. Un fonctionnaire du ministère des Affaires indiennes le convainc de demeurer chef. La vie est ardue sur la réserve de 16 milles carrés et ce n’est qu’en 1884 que la bande commence à recevoir les instruments aratoires, le bétail et la formation qui leur avaient été promis aux termes du Traité n° 6. La même année, One Arrow participe à un conseil de chefs auquel assiste Gros-Ours, pour discuter des actions non violentes à entreprendre pour forcer le gouvernement canadien à s’acquitter de ses obligations. Étant donné les griefs de sa bande et la proximité de Batoche, il n’est guère surprenant qu’il participe avec sa bande à la résistance armée contre les forces canadiennes envoyées dans la région pour supprimer les efforts de Riel, de Dumont et des autres personnes opposées à l’autorité canadienne. On ne sait trop si One Arrow participe à la bataille volontairement ou s’il y a été forcé par les Métis. Une version des événements veut que le conseiller agricole de la bande, un Métis nommé Michel Dumas, ait convaincu les Autochtones d’abattre leur bétail et de se joindre aux partisans de Riel à la mi-mars. Le consensus des historiens semble soutenir son point de vue selon lequel on l’a mis au défi de se battre. Il a été aperçu, lui et des membres de sa bande, à la bataille du lac aux Canards et autour de Batoche jusqu’à sa capture le 12 mai 1885. Toutefois, ses descendants maintiennent qu’il était un bon ami de Louis Riel et qu’il a volontairement et activement participé à la résistance.
 
Le 13 août 1885, One Arrow est traduit en justice à Regina pour répondre à une accusation de trahison. Faisant face à un système de justice qui ne lui est pas familier, et à des accusations qui le dépassent complètement, avec une traduction médiocre des actes de procédure, le chef est déconcerté et confus par l’ensemble des procédures. Une partie de l’accusation officielle indique que lui-même et d’autres « se sont rassemblés et réunis de pour agir façon malveillante et criminelle contre notre souveraine la Reine, sa Couronne et sa dignité ». Après avoir entendu la traduction des accusations en cri, il demande si le traducteur est ivre. Comment aurait-il pu « enlever le bonnet de la Reine et la poignarder dans le dos avec son sabre », alors qu’il ne l’avait jamais rencontrée? Après avoir été trouvé coupable, il mentionne avoir été contraint par Gabriel Dumont de quitter sa réserve et de se joindre aux Métis, qu’il n’a tiré sur personne et n’a jamais eu l’intention de le faire.
 
Condamné à trois ans de prison au pénitencier de Stony Mountain du Manitoba, One Arrow tombe gravement malade après sept mois d’incarcération. Incapable de marcher, il se voit d’abord transporté à l’Hôpital de Saint-Boniface, puis au à l’archevêché où réside Mᵍʳ Alexandre Taché. C’est là que mourra One Arrow le dimanche de Pâques 25 avril 1886, deux semaines après être sorti du pénitencier. S’étant converti au catholicisme durant son emprisonnement ou peu de temps après, il reposera dans le cimetière de la cathédrale après une cérémonie catholique. Le repère de sa tombe, dûment installé, a disparu avec le temps, comme des milliers d’autres dans le cimetière.
 
Pendant plus d’un siècle, les membres de la communauté One Arrow croiront que leur ancien chef a été enterré sur le territoire de la réserve. C’est au milieu des années 1990 qu’ils obtiennent finalement le certificat de décès du chef, et apprennent qu’il a été enterré à Saint-Boniface. En réaction aux personnes qui souhaitent rapatrier ses restes sur la réserve, les aînés répondent que le Grand Esprit veut qu’il demeure là où il est. On commande alors une pierre tombale impressionnante pour commémorer le souvenir de One Arrow. Celle-ci est installée à quelques pieds de distance de la tombe de Louis Riel. En 2005, toutefois, la présence spirituelle du chef commence à se manifester pendant une cérémonie de sudation, entre autres cérémonies tenues sur la réserve. On en viendra à organiser une cérémonie de la tente tremblante, dans le dessein de communiquer directement avec son esprit, ce qui mènera à la conclusion que One Arrow veut revenir chez lui. On demande donc l’autorisation d’exhumer ses restes, laquelle a été accordée par le gouvernement manitobain et les autorités ecclésiastiques. Avec l’aide de chercheurs contractuels et d’un archéologue, les restes, dont l’emplacement n’est plus visible depuis longtemps, sont retrouvés vers la fin du mois d’août 2007 au moyen de la technologie du géoradar et des « mouvements de la tête » de certains aînés qui participent aux recherches. Il importe de noter que la plupart des tombes du cimetière sont placées dans un axe nord-sud, mais que la tombe de One Arrow était placée dans un axe est-ouest dans le respect des traditions autochtones.

EN FRANÇAIS

Chapitre 08.png

EN MÉTCHIF

Les membres de la communauté One Arrow et les Métis étaient amis. La communauté One Arrow First Nations en Saskatchewan est la plus proche du village métis de Batoche. Son chef One Arrow avait signé à contrecœur le Traité No 6 en 1876.

Quand Louis Riel est revenu en Saskatchewan pour aider les Métis à protéger leurs droits et établir un gouvernement provisoire, One Arrow avait assisté à leurs discussions.

Ce chef était mécontent du non-respect des traités de la part du gouvernement.

Sa communauté, comme bien d’autres communautés autochtones, crevait de faim.

Quand Gabriel Dumont et Louis Riel ont approché One Arrow pour lui demander de se battre avec eux à Batoche, il a accepté. Leur mission était la même.

De plus, il y avait des liens de famille entre eux compte tenu des nombreux mariages entre les Métis de Batoche et les membres de la réserve de One Arrow.

La guerre a été perdue, et les participants à la bataille de Batoche qui appartenaient aux communautés métisses et autochtones ont été poursuivis en cours.

One Arrow a été accusé de trahison contre le gouvernement canadien à cause de sa participation à la résistance métisse de 1885.

Emprisonné à Stony Mountain, il a été relâché après quelques mois pour cause de maladie. Il est mort peu de temps après.

Pendant bien des années, les membres de la communauté One croyaient que leur chef reposait dans leur communauté.

Quand ils ont trouvé le certificat de décès, ils ont été surpris d’apprendre qu’il avait été enterré dans le cimetière de la cathédrale au Manitoba.

La communauté voulait rapatrier leur ancien chef, mais les aînés ont conseillé de le laisser à Saint-Boniface.

Ils ont quand même érigé une pierre tombale près de la tombe de son ami Louis Riel. Les paroles de One Arrow y sont inscrites : « Ne maltraitez pas mon peuple ».

Douze ans plus tard, on a procédé à des cérémonies sacrées, et c’est arrivé que le jour de sa cérémonie de réenterrement en Saskatchewan était le même jour qu’il avait signé le Traité No 6, le 28 août.

Le matin de cette cérémonie dans la communauté de One Arrow, on a vu une éclipse de la lune.

Le chef One Arrow était revenu chez lui en 2007, 120 ans après sa mort.

Ka-payak-waskonam, nous te remercions pour ton amitié et pour ton courage.

Li peup di One Arrow pi li Méchisse l’ita di bon z’ami. Li Premyerre Nasyon One Arrow an Saskatchewan sonta la komunôti la plus prosh dju villaj méchisse di Batosh. Mêm si y fila pâ pour ferre sâ, leu shef, Une Flèche, l’ava signi l’tretti #6 an 1876.


Kan Louis Riel la r’vnu back an Saskatchewan pour édi li Méchisse a prâtiji leu drwa pi einstalli ein gouvarnman tanpârerre, Une Flèche l’ita a leu rankont.


Ste shef l’ita pâ kontant kli tretti l’ava pâ iti respekti par li gouvarnman. Sa komunôti krèva d’fein, kom bein d’izôt komunôti Otoktonne.


Kan Gabriel Dumont pi Louis Riel la dimandi a Une Flèche di s’batte avec izôt a Batoche, yâ dji wè.


Y l’ava la mêm misyon – d’y s’batte pour leu drwa pi prâtiji leu peup.


Aparsâ, y l’ava bein di lyein di faméye a kouze di bein di mariaj ant li Méchisse di Batoche pi li seuze di Premyerre Nasyon One Arrow.


La gerre lâ iti pardju pi li Méchisse pi li Premyerre Nasyon ksa lâ parchisipi a Batoche, lâ iti amni an kour.


Une Flèche lâ iti akuzi d’êt ein trêt kont l’gouvarnman cadadjyein, paski lâ parchisipi dan la Risistans méchisse di 1885.


Y l’ita an prizon a Stony Mountain, pi lâ iti lâshi kuk mwa apra, paski l’ita malad. Y li morre kuk tan apra.


Pandan bein di z’anni, l’mond di Premyerre Nasyon One Arrow y pansa k’Une Flèche y r’poza dan leu komunôti.


Kan y l’ava trouvi li papyé su sa morre, l’ita bein supri di sawerre k’leu shef l’ita anterri dan simchyerre d’la Katidral dju Manitoba.


La komunôti voula l’ram’ni back leu ansyein shef mi leu z’éni lâ dji d’l’lessi a Saint-Boniface.


L’onva kan mêm monti enne pyerre pour sa tonb a kôti di sel di Louis Riel. Li mô d’Une Flèche ita ikritte latsu : « Tretti pâ mal mon peup. »


Douze z’anni apra, pandan di sirimâni sakri.


San l’awerre organizi sâ dimêm, l’jour d’la sirimâni pour l’anterri an Saskatchewan l’ita li 28 août, l’mêm jour ki l’ava signi pour ferre parchi dju Tretti #6.


L’matein di ste sirimâni-lâ, dan la komunôti di Premyerre Nasyon One Arrow, lâ vu ein iklips d’la lune.


Une Flèche l’ita r’tourni back shizeu an 2007, 120 z’anni apra sa morre. Sa ti r’marsi pour ton amichyé pi ton kouraj Ka-payak-waskonam.

retour.png

Incendie de la cathédrale

Le 22 juillet 1968, la cathédrale de Saint-Boniface prend feu à cause d’une cigarette mal éteinte. Une foule se rassemble pour observer l’incendie qui enflamme rapidement l’église. Peu de temps avant qu’un groupe de pompiers entre dans l’église, un des clochers s’effondre complètement, leur évitant le pire.

09-Cathédrale-1.png

L’incendie de la cathédrale se superposera sur la cathédrale Saint-Boniface. Empruntez le principal trottoir du cimetière de Saint-Boniface. En regardant vers la cathédrale, placez-vous entre les lampadaires du trottoir les plus proches de la cathédrale.

CALEPIN HISTORIQUE

 

À l’instigation de lord Selkirk, fort de l’appui d’une pétition signée par un certain nombre de résidents de la jonction des rivières Rouge et Assiniboine, Mᵍʳ Plessis, évêque de Québec, autorise l’établissement d’une mission catholique dans ce qui s’appelle à l’époque le district d’Assiniboia, situé à l’intérieur des terres administrées par la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH). Arrivés de Montréal dans un canot de traite des fourrures le 16 juillet 1818, les pères Norbert Provencher et Sévère Dumoulin, ainsi qu’un séminariste, Guillaume Edge, entreprennent leur tâche de répondre aux besoins des catholiques de la région et « d’évangéliser les nations » de l’ouest du lac Supérieur jusqu’à l’océan Pacifique, du Nord jusqu’aux mers arctiques et du sud jusqu’à la limite nord du diocèse de Dubuque en Iowa. Les religieux prennent possession d’une petite maison située sur une parcelle de terre cédée à la mission par Selkirk, qui est aujourd’hui bordée par la rivière Rouge entre les rues Masson et Despins, et par la rue Aulneau à l’est.
 
Le 1ᵉʳ novembre 1818, la mission de Saint-Boniface est inaugurée sous le patronnage de l’évangéliste légendaire. L’année suivante verra la construction d’une église en bois rond de 9 mètres sur 15 mètres, ne comportant qu’une seule flèche. On utilisera pour se faire du bois d’œuvre récolté près de l’embouchure de la rivière Sale à quelque 18 kilomètres plus au sud. La crue de la rivière Rouge de 1826 l’endommagera gravement. Lorsque Norbert Provencher est élevé au rang d’évêque coadjuteur du Nord-Ouest en mai 1822, la CBH lui offre de subventionner la construction d’une structure plus importante qui lui servirait de cathédrale. Étant donné qu’il faut tailler et transporter les pierres jusqu’au chantier à partir d’une carrière riveraine située près des rapides de St. Andrews, à 25 kilomètres au nord, et que les maçons en pierres sont rares, il faudra quelque 25 années pour mener à terme la construction d’une grande église à deux flèches jumelles qui aurait fait la fierté de nombreuses paroisses déjà bien établies sur les rives du fleuve Saint-Laurent, au Bas-Canada. Dans un poème de 1859, de l’américain John Greenleaf Whittier, intitulé Le voyageur de la rivière Rouge, beaucoup ont l’occasion de lire les mots suivants au sujet des cloches de Saint-Boniface : « Les cloches de la mission catholique romaine lancent des appels de leurs tourelles jumelées au batelier sur la rivière, au chasseur sur la plaine ». Malheureusement, le 14 décembre 1860, l’église est en grande partie détruite par un incendie ayant débuté dans la cuisine attenante. Des sœurs Grises et leurs jeunes aides fabriquaient des bougies pour les messes de Noël avec de la graisse qui a pris feu sur un poêle.
 
En utilisant essentiellement les mêmes fondations et en recyclant les blocs de pierre taillés, le successeur de Mᵍʳ Provencher, Mᵍʳ Alexandre Antonin Taché construit une cathédrale plus modeste qui ne comporte qu’un seul clocher. C’est dans cette cathédrale que les funérailles de Louis Riel auront lieu le 12 décembre 1885. Sa dépouille, et celles de son épouse et de leurs trois enfants sont enterrées juste à droite du site des portes principales de la « cathédrale de Taché ». Lorsque le terrain du cimetière est sec, ainsi qu’à l’automne, on peut encore voir le tracé des fondations des deux anciennes églises.
 
Au début des années 1900, Mᵍʳ Adélard Langevin, qu’on surnommera plus tard « le bâtisseur » en raison de ses efforts pour donner à Saint-Boniface un certain nombre de structures institutionnelles impressionnantes, croyait que le moment était venu de construire une nouvelle cathédrale. Il était d’avis que la structure devait refléter le statut de la cathédrale de Saint-Boniface comme « église mère » du catholicisme dans l’Ouest canadien, et d’un diocèse qui s’étendait de la Saskatchewan à Thunder Bay, en Ontario. La construction débutera en 1904 et une fois terminée en 1908, comptera deux clochers hauts de plus de 41 mètres (135 pieds) jusqu’au sommet des croix, un balcon impressionnant et une fenêtre en rosace sur le devant, mesurant plus de 99 mètres (125 pieds). Sous les plafonds voûtés étaient installés des balcons de chaque côté de la nef et un jubé impressionnant pour le chœur. Considérée comme l’église la plus imposante de l’Ouest canadien, elle pouvait accueillir 2 000 fidèles. On lui attribuera éventuellement le titre honorifique de basilique mineure. Le 22 juillet 1968, malheureusement, un incendie allumé par un mégot de cigarette dans les combles en détruira tout l’intérieur. Il n’en restera que la façade, les murs de pierre et la sacristie.
 
Face à la perte de leur cathédrale emblématique, bon nombre de paroissiens en espèrent la reconstruction à n’importe quel coût. Selon l’architecte Étienne Gaboury, la réfection de la toiture, du plancher et des murs intérieurs uniquement aurait coûté plus de six millions de dollars. « laisse faire construire une cathédrale », conclut-il. Dans la foulée des réformes de Vatican II pour l’Église catholique et en raison du coût de remplacement de la cathédrale qui avait été assurée pour une valeur d’un demi-million de dollars, Mᵍʳ Maurice Baudoux a une vision plus modeste. L’architecte Gaboury se voit accorder un contrat d’une valeur de 625 000 $ à deux conditions : construire un édifice de forme carrée qui pourra accueillir mille personnes. L’architecte prend alors la décision de construire une cathédrale réellement moderne dans les ruines de l’ancienne structure, une approche qui suscite toujours l’admiration plus de 50 ans après l’inauguration de la nouvelle cathédrale en 1972. Conçue pour se conformer à la modernisation de l’Église après Vatican II, la cathédrale actuelle offre une ambiance chaleureuse et accueillante à ses visiteurs, qui sont souvent stupéfaits par l’interprétation du Chemin de croix de Gaboury dans les vitraux. Une caractéristique remarquable est le puits de lumière au-dessus de l’autel, qui met en valeur le Christ ressuscité, tout en restant invisible aux yeux de l’assistance. Lorsque le soleil traverse le ciel à l’ouest, toutefois, la lumière entre par la fenêtre et projette l’image du Christ sur le mur derrière l’autel.
 
On peut consulter des illustrations des diverses églises et cathédrales de même que des notes historiques sur le mur du columbarium situé dans le coin sud-ouest du cimetière.

EN FRANÇAIS

Chapitre 09.png

EN MÉTCHIF

J’entends des cris et je cours à la fenêtre pour voir ce qui se passe. Je peux voir les flammes dans le ciel. Pour quelques moments, j’arrête de respirer.

Ça fait un froid dans l’âme de voir brûler la cathédrale dans laquelle je me suis mariée il y a huit ans…

Encore pire, on vient JUSTE de célébrer le 150e anniversaire de la mission de Saint-Boniface.

Par le temps qu’on arrive, il y a déjà une foule de gens autour de la cathédrale en feu.

Mon mari, c’est un pompier, et il essaye immédiatement de les faire reculer parce que c’est trop dangereux. Mais les gens sont trop fascinés ou trop bêtes pour écouter.

Mais ils se reculent assez vite quand les morceaux de la cathédrale commencent à tomber.

Deux pompiers avancent vers la porte de l’escalier pour monter dans la tour armés d’un boyau, avec l’idée d’arroser le toit plus directement.

Soudainement, les cloches s’effondrent! Ces cloches immenses auraient pu tuer tous ceux qui montaient dans la tour.

On remercie souvent le bon Dieu quand on est femme d’un pompier…

Les pompiers, ils comprennent vite que c’est peine perdue d’essayer de sauver la cathédrale.

Tout ce qu’ils peuvent faire maintenant, c’est de l’arroser puis d’essayer de protéger les édifices autour.

Ce n’est pas la première fois qu’une église prend feu. Ce n’est même pas la première fois que la cathédrale de Saint-Boniface prend feu.

Mais, quand même, voir brûler la maison du Seigneur, ça ébranle drôlement.

On pense que c’est la cigarette d’une des personnes qui réparaient le toit qui a commencé le feu.

J’antan di kri pi sh’kour ô shâssi pour werre kousé ke s’pâsse. Shu kapab werre li flamme dan l’siel.

Pour kuk sgonde, j’respire pu. Jâ frette dan l’âme d’werre la katidral bruli divous ke j’mâ maryé v’lâ 8 z’anni…

Pi s’k’ita pluss pire, si kon v’na juss di silibri li 150yemme annivarserre d’la misyon di Saint-Boniface.

Par li tan kon arrive, mon mari li ein ponpyé, y l’ava bein dju mond alantour d’la katidral an feu.

Paske sa li tro danjreu, mon mari assèye toutte switte di ferre r’kuli. Mi l’mond l’ita tro en trans pour ikouti.

Mé, sa rikule bein vitte kan di morsô d’la katidral lâ komansi a tonbi.

Deu ponpyé y von prosh d’la porte d’l’eskalyé, pour monti dan la tour avec enne hoze, pansan k’y’alla arrozi l’twa djirekman.

D’ein kou, li klosh y tonbe ! Si grosse klosh l’ara pu chuwé toul’mond ke monta dan la tour.

Li ponpyé lâ vitte konpri ksa vala pâ la penne d’assèyi d’sôvi la katidral.

Toutte kousé ksa pouva ferre asteur sta d’arrozi et assèyi prâtiji li bâchisse alantour.

Spâ la premyerre fwè k’enne iglize a pran an feu. S’mêm pâ la premyerre fwè ke la Cathédral di Saint-Boniface lâ pri an feu.

Mé werre bruli la mizon dju Seigneur li bein diranjan.

Sa pans ke sta la sigarette d’enne di parsonne ke arranja l’twa, ke lâ komansi l’feu. D’y foi si yeink une p’chit aferre ki fait ben du troub por une grosse aferre.

retour.png

L’espoir survit à la destruction culturelle

De nombreux enfants ont été forcés de vivre dans des pensionnats autochtones, arrachés à leur famille et empêchés de vivre leur culture. Certains ne sont jamais revenus chez eux. Heureusement, les enfants qui sont revenus ont pu réapprendre leur langue et leurs traditions. Cette histoire est partiellement racontée en anishinaabemowin. Veuillez l’écouter avec le cœur.

Chapitre 10.jpg

Devant l’archidiocèse de Saint-Boniface (151, av. de la Cathédrale). Tenez-vous à côté de la statue dans la cour circulaire avant, face au porche et aux escaliers.

CALEPIN HISTORIQUE

 

Desmond Mentuck est originaire de la Première Nation Waywayseecappo, qui a signé un traité en 1874. Desmond est Anishinabe et a entrepris de retrouver sa langue d’origine et son mode de vie, gravement que l’époque des pensionnats a gravement minés. Il milite également pour faire renaître sa langue et faire connaître sa culture dans le domaine de la conservation des ressources naturelles.

EN FRANÇAIS

Chapitre 10.jpg

EN MÉTCHIF

(paroles en anishinaabemowin)


Même si tu ne comprends pas les mots, écoute avec ton cœur.


Lorsque je pense aux premiers jours de mon enfance, je ne peux m’empêcher de ressentir de la tristesse.


Une tristesse si profondément ancrée que je n’en comprends que maintenant l’origine, après de nombreuses années de recherche du bonheur et de l’équilibre dans ma vie.


Les vagues de destruction créées par les écoles résidentielles ont déferlé sur plusieurs générations et continuent de frapper une nouvelle génération de personnes qui n’ont aucune idée de qui elles sont ni d’où elles viennent.


Je suis la voix de quelqu’un dont la famille a subi de nombreux changements. Nous avons vécu de nombreux cauchemars et moments de désespoir total.


Nous avons continué à chercher le bonheur et avons traversé de nombreuses nuits sombres pour arriver là où nous sommes aujourd’hui.


Ma voix porte à travers les années. Elle peut être entendue par de nombreuses personnes qui ont éprouvé les mêmes sentiments et ont été témoins des mêmes épreuves.


J’ai été porté sur le dos de personnes qui ont parcouru un chemin que je ne pourrai jamais comprendre entièrement.


Cette route était dure et rocailleuse. Il y avait de la peur et de la tristesse de chaque côté.


Cette route laissait derrière elle une vie pleine d’amour et de stabilité, et une riche histoire liée à la terre.


Cette route a mené ma famille à travers des années de chaos et nous a guidés à un endroit où nous nous sommes retrouvés.


Aujourd’hui, je suis nourrie et aimée par des personnes qui se sont retrouvées après avoir perdu tant de choses.


Ils me conduisent sur une route pleine d’images et de sons étonnants et magnifiques. Ils me parlent dans une langue que je peux ressentir dans mon esprit.


Cette langue me transporte vers un endroit qui me relie à mes ancêtres et à mon créateur.


Cette connexion a toujours été là. Elle attendait que je la prenne, et que je me retrouve.


Nous pouvons avoir de l’espoir maintenant et regarder vers l’avenir. La route sur laquelle nous marchons présentement est bordée de beaucoup de personnes fortes de chaque côté.


Les générations qui nous ont portés et qui ont porté un si lourd fardeau peuvent maintenant se reposer.
 
Nous portons maintenant leur histoire et leur force. Nous parlons leur langue avec fierté, sachant qu’elle a toujours été là, à nous attendre.
 
Nous pouvons parcourir cette route avec puissance, en sachant que chaque chose nous attendait.
 
Nous sommes les guides maintenant : nous pouvons montrer à nos enfants d’où ils viennent et qui ils sont.

(Sa parl en anishinaabemowin)


Mêm si tchu konpran pâ li mô, ikoute avek ton keurre.


Kan j’pans ankor a li premyé jor di kan sh’ta pchi, shu pâ kapab m’anpéshi, sh’file ankor triss.


Enne tristesse si kreuze, ke si yeink asteur, ke j’konpran divou sa vyein.


Li vag ke kâsse toutte la, fette par li z’ikol rizidansyel, l’on pâssi d’enne jinirasyon a l’ôt, pi konchune a frappi su enne jinirasyon novel di parsonne.


Shu la vwè di kekun, divous ke la faméye, la eu bein di shanjman. Sa lâ viku, an mass di mova rêve, pi di tan di grô dizespwerre.


Nouzôt, sa konchune a sharshi l’boneur, pi sa lâ pâssi a traverre bein di nwitte blansh, pour arrivi divou sa li randju ojordjwi.


Ma vwè li pluss forte, avek li z’anni. A pu êt antandju par an mass di parsonne.


Sta ein sh’mein djure, avek bein di rosh.


Y l’ava d’la peur pi d’la tristesse shak kôti. Ste sh’mein-lâ, lessa an aryerre, toutte enne vi ranpli d’amour, d’êt stab pi enne grande istwerre avek la terre.


Ste sh’mein-lâ, lâ amni ma faméye a traverre di z’anni di troube, pi nôzâ amni a enne plasse, divous sa si r’trouvi.


Ojordjwi, sh’file bein pi emmi, par di parsonne ke sta r’trouvi, apra awerre pardju telman d’aferre.


Y m’amenne su ein sh’mein plein d’imaj, pi di son pâ kréyab pi bein bô.


Y m’parl dan enne lang ke j’peu filé dan mon espri. Ste lang-lâ m’amenne a enne plasse, divou j’wè mi zansêt, pi mon Kriyateur.


Ste konneksyon la toultan iti lâ, pi a m’attanda. A l’attanda ke j’la prenne, pi ke j’ma r’trouve.


Asteur, sa peu awerre d’l’espwerre pi r’gordi l’fuchur. L’sh’mein divou sa marsh dret-lâ, lâ bein dju mond forre su shak koti.


Li jinirasyon ke l’ava porti nouzôt pi ein fardo si pizan, sa peu s’r’pozi asteur. Si nouzôt dret-lâ, ke sharri leu z’istwerre pi leu fors.


Nouzôt, sa li fyerre kan sa parl notte lang, paske a lâ toultan iti lâ, a nô z’attand. Sa peu alli su ste sh’mein-lâ, avek d’la fors, paske sa sé, ki l’ava kechôze ke nô z’attanda.


Asteur, si nouzôt li gid : sa peu montri a nô z’anfan, divou ksa vyein pi ki sa li.
 
Desmond Mentuck, y vyein d’enne komunôti di Premyerre Nasyon Waywayseecappo, ke l’ava signi ein tretti an 1874.
 
Desmond l’ita ein Anishinaabe, ke fa ein wéyaj, pour rawerre sa lang ki li ni avek, pi sawerre koman ki viva, di shôze ke l’ava iti marki d’enne manyerre sarieuze, par la piriode di pansyonâ.
 
Y s’bâ itou pour gardee sa lang pi partaji sa kulchure, dan toutte ski lâ aferre, avek sôvi li r’sours nachurel.

retour.png

Gabrielle Roy

Nous découvrons la vie de l’auteure Gabrielle Roy en ouvrant quatre chapitres de sa biographie, de sa jeunesse à l’enseignement, au journalisme et à l’étude du théâtre. Gabrielle est née à Saint-Boniface et est devenue une grande auteure. Elle contemplait souvent par une fenêtre les champs qui entouraient la maison familiale.

11-GabrielleRoy-1.png

Cette expérience se superposera à la Maison Gabrielle Roy. Placez-vous dans la zone herbeuse de la cour avant, et pointez l’appareil vers la maison.​

CALEPIN HISTORIQUE

 

Chronologie de Gabrielle Roy (1909 à 1983)


1909 – Naissance le 22 mars, à Saint-Boniface (Manitoba).


1915-1928 – Études à l’Académie Saint-Joseph de Saint-Boniface.


1928-1929 – Études pédagogiques au Winnipeg Normal Institute.


1929-1930 – Premier poste d’institutrice, à Marchand d’abord, puis à Cardinal.


1930-1937 – Institutrice de première année à l’Institut Provencher de Saint-Boniface (école de garçons); parallèlement, activités théâtrales au Cercle Molière.


Été 1937 — Poste temporaire à l’école de la Petite-Poule-d’Eau.


1937-1939 – Séjour en Angleterre et en France; études d’art dramatique; voyages.


1939-1945 – De retour d’Europe, Gabrielle Roy s’installe au Québec et vit des textes qu’elle vend à divers périodiques montréalais tout en entreprenant la rédaction de Bonheur d’occasion; elle habite surtout à Montréal, mais fait de fréquents séjours à Rawdon et à Port-Daniel.


Été 1945 – Publication à Montréal de Bonheur d’occasion.


1947 — La traduction anglaise de Bonheur d’occasion (The Tin Flute) est choisie comme livre du mois de mai par la Literary Guild of America; en juin, achat des droits cinématographiques par Universal Pictures; en août, Gabrielle Roy épouse Marcel Carbotte; en septembre, elle est reçue à la Société royale du Canada; en novembre, l’édition française de Bonheur d’occasion lui permet de remporter le prix Fémina.


1947-1950 – Fin septembre 1947, Gabrielle Roy et son mari partent pour Paris; ils y passeront trois ans; elle fait des séjours en Bretagne, en Suisse et en Angleterre.


1950 — Parution à Montréal de La Petite Poule d’Eau qui, l’année suivante, sera publiée à Paris, et à New York en traduction anglaise (Where Nests the Water Hen).


1950-1952 – De retour de France, le couple s’installe d’abord à Ville Lasalle, puis à Québec, où Gabrielle Roy vivra jusqu’à la fin de sa vie.


1954 — Publication d’Alexandre Chenevert à Montréal et à Paris; l’année suivante, la traduction anglaise paraît sous le titre The Cashier.


1955 — Publication à Montréal et à Paris de Rue Deschambault dont la traduction anglaise paraîtra en 1956 (Street of Riches) et permettra à l’auteure d’obtenir le prix du Gouverneur général du Canada.


1956 — Gabrielle Roy reçoit le prix Duvernay.


1957 — Acquisition d’une propriété à Petite-Rivière-Saint-François où Gabrielle Roy passera dès lors ses étés.


1961 — Voyage en Ungava, puis en Grèce avec son mari; à l’automne, parution à Montréal de La Montagne secrète, dont l’édition parisienne et la traduction anglaise (The Hidden Mountain) sortiront l’année suivante.


Hiver 1964 — Séjour en Arizona, où elle sera présente auprès de sa sœur Anna au moment de son décès.


1966 — Parution de La Route d’Altamont et de sa traduction anglaise (The Road Past Altamont).


Été 1967 — Publication d’un texte sur le thème Terre des hommes dans un album de l’Exposition internationale de Montréal; en juillet, Gabrielle Roy est faite compagnon de l’Ordre du Canada.


1968 — Doctorat honorifique de l’Université Laval.


1970 — En mars, voyage à Saint-Boniface auprès de sa sœur Bernadette, mourante; à l’automne, publication de La Rivière sans repos et de sa traduction anglaise (Windflower).


1971 — Gabrielle Roy reçoit le prix David.


1972 — Publication de Cet été qui chantait dont la traduction anglaise paraîtra en 1976 (Enchanted Summer).


1975 – Parution d’Un jardin au bout du monde dont la traduction anglaise sera publiée en 1977 (Garden in the Wind).


1976 – Publication d’un album pour enfants Ma vache Bossie.


1977 — Publication de Ces enfants de ma vie, récompensé par le prix du Gouverneur général et dont la traduction anglaise paraîtra en 1979 (Children of My Heart).


1978 – Gabrielle Roy reçoit le prix Molson du Conseil des Arts du Canada; parution de Fragiles lumières de la terre dont la traduction anglaise sera publiée en 1982 (The Fragile Lights of Earth).


1979 — Publication d’un second album pour enfants, Courte-Queue, qui procure à l’auteure le Prix de littérature jeunesse du Conseil des Arts du Canada et qui paraît l’année suivante en traduction anglaise (Cliptail).


1982 – Publication de De Quoi t’ennuies-tu, Éveline?


1983 — Décès, à l’Hôtel-Dieu de Québec, le 13 juillet.


1984 — Publication de l’autobiographie intitulée La détresse et l’enchantement

Chapitre 11.png

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Préface — Est-ce que vous sentez une petite brise sur la galerie? C’est moi… Gabrielle Roy.

Je suis de retour, et je me vois ici dans mon hamac à l’âge de 8 ans. J’ai la coqueluche et je passe tout l’été là.

Dans les nuages je vois des châteaux et des chevaux et des explorateurs de l’Ouest. Ce gros nuage-là, c’est Louis Riel, le père du Manitoba.

C’est lui qui a mis le français et l’anglais à parts égales dans la constitution du Manitoba.

En 1916, ma première année d’école, le gouvernement du Manitoba a passé une loi interdisant l’enseignement du français. Louis Riel aurait été vraiment déçu!


 

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 1 — Mon père, Léon Roy, il accueille les peuples de la terre entière!

Comme agent du gouvernement canadien, il aide les immigrants de partout dans le monde, de la France à l’Ukraine, à venir s’établir sur les terres de l’Ouest.

Aujourd’hui, j’entends de la cuisine la voix fatiguée de mon père qui revient de son long voyage dans l’Ouest.

Je suis surprise de le voir arriver sans son cheval.

Mon père pense que je ne peux pas l’entendre de mon hamac, mais je l’entends raconter à ma mère comment il a dû convaincre toute une communauté d’évacuer leurs maisons et leurs fermes pour se sauver d’un feu de prairie.

Mais lui, étant le dernier à partir, mon père s’est caché dans un puits pour se sauver la vie. Le cheval n’a jamais voulu partir sans lui, et il est mort dans le feu.

J’ai raconté cette histoire, Le puits de Dunrea, dans mon roman Rue Deschambault.

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 2 — J’ai mon premier poste comme enseignante à Marchand au Manitoba. Dans cette petite école, je suis entourée d’enfants métis.

La journée de mon arrivée, mes élèves et moi sommes allés veiller au corps d’une compagne de classe morte de tuberculose.

Pour lui rendre hommage, on l’a couverte de roses sauvages. De ces enfants-là, j’ai appris plus de leur courage et de leur résilience qu’eux ont appris de moi.

L’enfant morte est mon récit de cet incident dans Cet été qui chantait.

Plusieurs de mes nouvelles et de mes romans ont été inspirés de mes années d’enseignement au Manitoba.

La nouvelle Le village rouge se situe à Cardinal, à l’ouest de notre province.

Le roman Ces enfants de ma vie est inspiré de mes sept années auprès de petits immigrants à l’École Provencher de Saint-Boniface.

Mes derniers mois comme enseignante, avant de partir pour l’Europe, se sont déroulés dans un endroit isolé du nord du Manitoba.

Treize ans plus tard, mes souvenirs de ce séjour ont inspiré mon deuxième roman, La petite poule d’eau.
 

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 3 — En tant que journaliste, j’ai fait des reportages dans l’Ouest avec des personnes venues de partout dans le monde.

Dans Fragiles Lumières de la terre, vous trouverez mes écrits au sujet des huttérites installés le long de la rivière Assiniboine au Manitoba, des doukobhors, des mennonites, des Allemands des Sudètes en Saskatchewan et des Ukrainiens en Alberta.

Bien de ces nouveaux arrivants fuyaient les conditions de persécution religieuse ou politique de leur pays natal.

On n’a pas besoin de regarder à l’autre bout du monde pour trouver des exemples de persécution.

Les Métis du Manitoba et de la Saskatchewan sauront vous le dire. Il y a de la persécution dans tous les pays et à toutes les époques de l’humanité, même de nos jours.
 

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 4 — Dans mon parcours de vie, je crois avoir fait honneur aux valeurs de Louis Riel.

Dans ma douzième année, j’ai gagné les plus hauts prix décernés par l’Association de l’éducation pour le français et par le Department of Education pour l’anglais au Manitoba.

Dans ma vingtaine, j’ai été comédienne dans la troupe française du Cercle Molière et de la troupe anglaise du Winnipeg Little Theatre.

J’ai fait des études en théâtre en Angleterre et en France. Comme enseignante, j’ai accueilli des petits immigrants de partout dans le monde.

En tant que journaliste, j’ai côtoyé des peuples de partout et j’ai raconté leurs histoires, leurs rêves et leurs défis.

Mes livres, dont beaucoup touchaient les réalités d’autres cultures, ont été traduits en vingt langues et se sont rendus partout dans le monde.

Peut-être que Louis Riel serait fier, qu’à ma façon, j’ai fait avancer sa vision. 

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Préface — Sa file tchu enne pchitte brize sul perron? Si mwé… Gabrielle Roy.

Shu r’vnu pi j’m’vwè isitte, dan mon amak kan j’ava 8 z’anni. Jâ la kokleush pi shu lâ toutte l’iti.

Dan li nuwaj, j’vwè di shâtô, pi di sh’fô, pi di ixploratur di l’Wess. Ste gro nuwaj-lâ, si Louis Riel, l’pérre dju Manitoba.

Si lwi ki lâ mi l’fransa pi l’angla, mwèchyé mwèchyé dan la charte dju Manitoba.

An 1916, ma premyerre anni d’ikol, l’gouvarnman lâ pâssi enne lwè divous ke l’fransa l’ita pu montri. Louis Riel l’ara iti bein dizapweinti.

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 1 — Mon pérre, Léon Roy, y r’swè dju mond di toutte la terre.

 

Kom ein ajan dju gouvarnman canadjyein y’éde di z’imigran di toupartou dan l’mond, pour v’nir s’einstalli su li terre di l’Wess.

 

Ojordjwi, j’antan d’la kwizinne, la vwè fachigi d’mon pérre, ke r’vyein back di son lon wéyaj dan l’Wess. Shu suprize k’y’arrive, pi k’yâ pâ son sh’fal, connè-tu l’nom d’son sh’fal? Non, moé non plu.

 

Mon pérre y pans ke sh’pu pâ l’antand di mon amak, pi y konte a ma mérre, koman y lâ konveinku toutte enne belle komunôti ke grandjissa, a lessi leu mizon pi leu ferme pour si sôvi d’ein feu di préri.

 

Mon pérre l’ita l’darnyé a parchir pi y s’y kashi dan ein pwi pour sôvi sa vi.

 

L’sh’fal lâ jama voulu parchir san lwi, pi li morre dan l’feu. Jâ konti st’istwerre Le puits di Dunrea dan mon live Rue Deschambault.

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 2 — Ma premyerre job kom mitresse, sta a Marchand ô Manitoba. Dan ste pchitte ikol-lâ, sta yeink di z’anfan Méchisse.

 

La journi ke sh’t’arrivi, mwé pi li z’ikolyi lâ iti vèyi ô korre pour enne ôt ikolyerre ky l’ita morte d’la tchuberkuloze.

 

An ségne di respa, sa lâ mi di roze sâvaj partou su elle. J’appri pluss di si z’anfan-lâ, su dju kouraj pi su l’andjurans, k’izôt sa lâ appri di mwé.

 

L’anfan k’ita morte si kousé ke jâ ikri dan mon live Cet été qui chantait. Bein di mi artchik pi di mi live, lâ iti ikri a kouze di mi z’anni ke sh’ta mitresse ô Manitoba.

 

L’artchik Le village rouge, sa vyein di Cardinal, dan l’wess dju Manitoba.

 

Li z’idi pou mon live Ces enfants de ma vie, sa vyein di mi sette z’anni avek di pchi z’imigran a l’École Provencher a Saint-Boniface.

 

Avan ke j’parre pour l’Uroppe, mi darnyé mwâ kom mitresse, l’ita dan enne plasse bein lwein dan l’norre dju Manitoba.

 

Tréze z’anni apra, mi souv’nir di stan-lâ m’a édi a ikrir mon deuziemme live La petite poule d’eau.

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 3 — Jâ fette di r’portaj dan l’Wess kom journalisse, avek di parsonne k’ita v’nu di partou dan l’mond.

 

Dan Fragiles Lumières de la Terre, sa vâ trouvi kousé ke j’lâ ikri su li z’Hutterite dju lon d’la rivyerre Assiniboine ô Manitoba, su li Doukobhors, li Mennonites, li Sudètes an Saskatchewan pi li z’Ukrainiens an Alberta.

 

Y nâ bein di si nouvô arrivan ki si sôve di danjé relijyeu oubindon pâlichik dju péyi divou ki sonta ni.

 

Lâ pâ bezwein d’r’gordi a l’ôt boutte dju mond pour werre di ixanp di danjé. Li Méchisse dju Manitoba pi d’la Saskatchewan peu n’an djirre lon latsu.

 

Mêm ojordjwi, y lâ d’la parsikusyon dan toutte li pèyi pi dan toutte li piriode di z’umein.

cliquez pour écouter le texte ci-dessous

Chapitre 4 — Dan toutte li z’itap di ma vi, j’pans awerre ânâri li valeur di Louis Riel.

 

Dan ma douziemme anni, jâ gagni li pri li pluss hô, danni par l’Assosiasyon d’l’Idjukâsyon pour li fransa pi par li Dipartman di l’Idjukâsyon pour l’angla ô Manitoba.

 

Kan j’ava apeupra 20 z’anni, j’ita enne aktriss dan la troup fransêze l’Cercle Molière pi dan la troupe anglèze dju Winnipeg Little Theatre.

 

Jâ ichudjyé dan téyât an Angleterre pi an France. Kom mitresse, j’a r’su di pchi z’imigran di toupartou dan l’mond.

 

Kom journalisse, jâ rankontri dju mond di toupartou pi jâ konti leu z’istwerre, leu rêve pi kousé ki l’ita djure a ferre.

 

Mi live, ke montra kousé ke d’ôt kultchur viva, lâ iti tradjwi dan 20 lang pi lâ iti anwèyi partou dan l’mond.

 

Tedbein ke Louis Riel, y s’ra fyerre ke j’aye fette avansi sa visyon, a ma manyerre.

retour.png

Pierre Gaultier de La Vérendrye

La Vérendrye visual.png
Chapitre 12.png

Pierre est le premier Canadien français à franchir Kabapikotawangag (lac des Bois en anishnaabemowin). Bien qu’il n’atteigne pas la mer de l’Ouest, sa réputation grandit au fur et à mesure qu’il échange des marchandises contre des peaux de castor et établit des relations avec les gens vivant le long des cours d’eau. Lorsqu’il se rend à la fourche des rivières Rouge et Assiniboine en 1738, les Nēhiyawak (Cris) et les Nakoda (Assiniboines) l’attendent pour nouer des alliances.

Les représentations du passé comme les figures de cette statue sont des interprétations colorées par le colonialisme. Elles soulèvent des questions difficiles sur le pouvoir et les points de vue. Alors que Pierre est célébré comme le découvreur de ces terres, on peut se demander : qui est exclu de l’histoire?

Pierre grandit dans la bourgeoisie, la classe moyenne de la Nouvelle-France. Jeune officier, il est blessé au combat et perd son grade de lieutenant, ce qui lui laisse peu de perspectives. Sa fiancée Marie-Anne Dandonneau, qui est instruite, use de son influence auprès des femmes de la classe supérieure pour garantir à son futur mari l’accès à des débouchés et rétablir son grade. Elle hérite de biens lors de leur mariage, ce qui permet au couple de s’installer dans la vallée du Saint-Laurent pour y mener une vie d’agriculture et de traite des fourrures. Quinze ans et six enfants plus tard, l’attention de Pierre se tourne vers l’Ouest. Marie-Anne ne voit plus beaucoup son mari par la suite. Elle gère habilement l’entreprise familiale jusqu’à sa mort en 1739. La situation financière de Pierre ne sera plus jamais aussi solide.

Les puissantes mères des clans Anishinaabe et Nēhiyawak sont des décideuses influentes et respectées dans leurs communautés. Elles aident à maintenir la paix, établissent des liens diplomatiques et concluent des accords commerciaux par le mariage. Pierre se marie deux fois dans l’Ouest avec des femmes dont il ne consigne pas le nom. Ces unions sont des accords vivants conclus de nation à nation et comportent des obligations familiales. Comme les femmes sont gardiennes et protectrices de la nibi (eau en anishinaabemowin), les autoroutes de l’époque, ces mariages donnent à Pierre, à ses fils et aux 50 Canadiens français avec qui il voyage, un accès crucial aux réseaux familiaux de commerce et de main-d’œuvre de ses épouses.

Pierre dépend de nombreuses personnes pour réaliser ses projets. Il forme des alliances avec les Premières Nations non seulement pour le commerce, mais aussi pour leurs compétences, leurs connaissances et leur protection. C’est d’un chef anishinini que Pierre apprend, en 1727, l’existence d’une route potentielle vers la mer de l’Ouest au-delà du lac Ouinipigon (Winnipeg en anishinaabemowin). Pierre rencontre ensuite Ochegach, un chef numakiki, qui lui dessine une carte et est désigné comme oshkaabewis (aide cérémoniel) pour lui montrer le chemin. Dix ans plus tard, la brigade de Pierre est escortée par 50 canots alliés nēhiyawak du lac Ouinipigon pour garantir un passage sûr. 

Pierre meurt en 1749 à Montréal. Ses voyages dans les prairies ont fortement marqué l’Ouest et la Nouvelle-France et ont changé à jamais de nombreuses vies.

En 1732, Pierre se joint à l’alliance Nēhiyawak-Nakoda-Anishinini contre les Dakhota. En 1736, 21 de ses hommes, dont son fils Jean-Baptiste et le père jésuite Aulneau, sont tués par des Dakhota de l’Est, à Kabapikotawangag. 

Les accords commerciaux de Pierre avec ses alliés incluent des esclaves et des armes à feu. Une année, 140 personnes Dakhota captives de guerres sont emmenées à Montréal, baptisées et instruites au catholicisme en route pour être vendues comme esclaves.

Le rôle de Pierre dans l’esclavage commence par des échanges de paix qui honorent la diplomatie autochtone traditionnelle. Au fil du temps, les personnes esclavagées deviennent une marchandise à vendre en Nouvelle-France. Parmi ses réalisations, Pierre cite, outre la traite des castors, les esclaves qu’il a obtenus pour la colonie.

Alors que nous découvrons cette histoire douloureuse, laissons-nous guider par des symboles de paix et de guérison.

En fin de compte, Pierre a exploité toutes ses relations – avec ses femmes, ses enfants, ses investisseurs, ses alliés, ses amis et même ses ennemis. Sa main-d’œuvre était composée de femmes, d’enfants, de travailleurs engagés (voyageurs) et de personnes en esclavage. Nombre de ses actions étaient fondées sur la croyance erronée en la supériorité européenne et sur son désir de gloire et de richesse. Bien que Pierre ait vécu à une époque et dans une société où l’esclavage était acceptable, son héritage ne peut plus être ignoré ni continuer à être glorifié.

Nous avons été appelés à agir concrètement en faveur du changement et de la réconciliation. Comment représenter l’histoire et préparer l’avenir?

Chronologie de Pierre Gaultier de La Vérendrye


1685 – Marie-Anne Dandonneau du Sablé est née à Les Cheneaux (Champlain), Nouvelle-France, le 30 août.


Pierre Gaultier de Varennes (plus tard de La Vérendrye) naît à Trois-Rivières, Nouvelle-France, le 17 novembre.


1687 – La traite des personnes captives de guerres des Premières Nations à des fins d’esclavage commence dans les colonies de l’Est. 


1704 – Pierre obtient le grade de cadet, puis d’enseigne. L’année suivante, il participe aux combats armés entre la France et l’Angleterre en Nouvelle-Angleterre.


1709 – Pierre, en tant que lieutenant, participe à la guerre de Succession d’Espagne, dans les Flandres; il est grièvement blessé à la bataille de Malplaquet, où il est fait prisonnier de guerre avant d’être libéré. 
 

1712 – Pierre obtient de la cour du roi la permission de rentrer en Nouvelle-France. Il se marie à l’automne avec Marie-Anne Dandonneau. Il avait renoncé à son grade dans les troupes canadiennes avant de quitter la colonie pour aller combattre en Europe. Mme de Vaudreuil convainc son mari, le gouverneur général, de rétablir la lieutenance de Pierre.
 

1715 – Louis XV devient roi de France et reste sur le trône jusqu’en 1774.


1726 – Pierre quitte Marie-Anne et leurs six enfants et accepte de travailler aux postes autour du lac Supérieur avec son frère Jacques-René, qui est nommé commandant. 
 

1727 – Pierre travaille pendant deux ans au poste de Sainte-Anne, sur le lac Nipigon. 
 

1728 – Il demande aux gens des Premières Nations qui viennent commercer au fort Kaministiquia des renseignements géographiques sur l’emplacement de la mer de l’Ouest. Il reçoit la visite d’un chef qui a voyagé jusqu’au lac Ouinipigon (Winnipeg) à l’ouest. 
 

1729 – Pierre rencontre Ochegach, un vieil homme numakiki (mandan) qui est un aide cérémoniel (oshkaabewis) asservi au chef Vieux Crapaud. Ochegach dessine à Pierre une carte sur un rouleau d’écorce de bouleau et lui parle du pays des Mandans. 
 

1730 – Pierre plaide sa cause auprès du gouverneur général Beauharnois, affirmant que cette carte les mènera jusqu’à la mer de l’Ouest. La France accepte de donner à Pierre le monopole de la traite à l’ouest du lac Supérieur. Plusieurs marchands de Montréal acceptent d’investir et de lui avancer des provisions pour la traite.
 

1731 – Pierre quitte Montréal pour l’Ouest en juin avec ses trois fils aînés, Jean-Baptiste, Pierre (Jr.) et François, son neveu Christophe Dufrost de La Jemmeraye et une cinquantaine de soldats et de voyageurs. Au fort Michilimakinac, l’équipage est rejoint par le père Charles Messager, prêtre jésuite. 
 

1732 – En juillet, Pierre rejoint ses hommes au fort Saint-Pierre, sur le lac à la Pluie, avec ses partisans et une escorte de 50 canots « amis » des Premières Nations (probablement des Algonquins, des Anishinaabés). Il établit le fort Saint-Charles à l’angle nord-ouest. Ce fort devient la base de ses opérations dans l’Ouest au cours des années 1730. 
 

Des cérémonies d’échange élaborées ont lieu au lac des Bois avec différentes nations. Au cours de cérémonies très protocolaires, Pierre se marie avec une mère de clan anishinaabée. Les mères de clan contrôlent à la fois le commerce sur les eaux et la division du travail dans leurs communautés. Pierre a donc accès à la main-d’œuvre, aux connaissances en matière de survie et aux réseaux de la famille de sa femme, ce qui lui ouvre les portes de la région pour le commerce.
 

1733 – C’est la première année qu’un grand nombre de Dakotas sont faits prisonniers de guerre et « conduits » (par canots et portages) à Montréal où ils sont vendus comme esclaves. Ils proviennent de raids de villages de ce que Pierre appelle les « Mascoutens Pouanes » ou Sioux des Prairies (Dakotas de l’Ouest). L’alliance Nēhiyawak-Nakoda-Anishinini (Cris Assiniboine/Oji-Cris) fait la guerre à ses ennemis traditionnels et vend ses captifs de guerre à Pierre. 
 

1735 – Pierre se trouve sur le lac des Bois avec son plus jeune fils, Louis-Joseph, et le père Jean-Pierre Aulneau, qui vient d’arriver de France. L’illusion que Pierre a créée d’une paix négociée par les Français avec les Dakota est brisée lorsque des groupes de guerre mixtes de Dakotas de l’Est-d’Anishinaabés commencent à attaquer les villages nēhiyawak et anishininis autour du lac des Bois et du lac à la Pluie, après avoir découvert que certains de leurs proches étaient retenus en esclavage par Pierre.
 

1736 – Au début de l’année, Pierre retourne au fort Saint-Charles depuis le fort Maurepas sur le lac Winnipeg (à l’embouchure de la rivière Rouge) pour découvrir que son neveu La Jemmeraye est mort au confluent des rivières Rouge et Roseau. Plus tard, deux des fils de Pierre iront l’enterrer à cet endroit.
 

Plus tard dans l’année, son fils Jean-Baptiste tombe dans une embuscade tendue par les Dakotas de l’Est au lac des Bois. Le massacre, au cours duquel lui, 19 voyageurs et le prêtre jésuite Aulneau sont brutalement tués et décapités, envoie le message que les Dakotas ne font plus confiance à la France en tant que partenaire commercial. Parmi les morts, on compte les voyageurs Jacques La Vallée, Paul Chevalier, François Provencher, Joseph de Laurier, Pierre Le Boeuf, Roc Touin, Antoine Millet et Jean-Baptiste Renaud. 800 Nēhiyawak (Cris des plaines) et Anishininis (Oji-Cris) implorent Pierre de venger le meurtre de son fils, qu’ils considèrent comme le « chef de deux nations », mais il les exhorte à ne pas faire la guerre, car il attend des approvisionnements du lac Supérieur. 
 

1737 – Les forces de Pierre étant épuisées par la marche, il envoie ses fils en reconnaissance à la fourche des rivières Rouge et Assiniboine. Pierre se rend à Montréal avec 14 canots remplis de fourrures qui lui permettront d’éponger ses dettes. 
 

1738 – Pierre passe l’hiver 1737-1738 comme invité du gouverneur général Beauharnois au château Saint-Louis. Il quitte Montréal au printemps et arrive au confluent des rivières Rouge et Assiniboine où l’attendent 200 tipis de Nakoda. Des cérémonies d’échange très protocolaires ont lieu au cours desquelles il semble que Pierre se marie une troisième fois avec une mère de clan Nēhiyawak ou Nakoda, dont il ne note pas le nom dans son journal. Une semaine après avoir quitté le fort Rouge qu’il a construit à la fourche, il arrive à Portage La Prairie, rejoint par les Nēhiyawak et les Nakoda tout au long de la marche. C’est là qu’ils construisent le fort La Reine.


1739 – Marie-Anne Dandonneau meurt en Nouvelle-France en septembre. Jusque-là, elle s’occupait des affaires familiales. Les finances de Pierre ne seront plus jamais aussi solides.
 

1742 – Pierre (fils) et François partent avec une escorte nakoda et deux interprètes voyageurs sur le sentier qui deviendra, pendant 200 ans, une route bien connue entre le Missouri et la baie d’Hudson. 
 

1743 – Les fils de Pierre retournent au fort La Reine. Sur le chemin du retour, ils enterrent une plaque de plomb portant les armoiries royales de la France à la source du Missouri, là où se trouve aujourd’hui Pierre, dans le Dakota du Sud. 
 

1744 – Pierre écrit au ministre Maurepas pour lui faire part de son travail acharné au fil des ans. Il invoque les trois principaux avantages de son travail pour la colonie, à savoir 1) le grand nombre de personnes de la colonie qu’il emploie et qui vivent de ses expéditions, 2) les esclaves qu’il procure à la colonie, et 3) les peaux qu’il intercepte et qui, autrement, iraient aux Anglais de la Baie.
 

1746 – Pierre est relevé de son commandement des postes de la mer de l’Ouest, qui est confié à M. de Noyelles. 
 

1748 – Le fils de Pierre, Louis-Joseph, se rend au Manitoba et rencontre M. de Noyelles qui rentre chez lui après un an et demi d’échec dans l’Ouest. La moitié des forts de La Vérendrye ont été détruits. Louis-Joseph les restaure en continuant sa route vers l’ouest.
 

1749 – Le gouverneur s’aperçoit que Pierre était le mieux placé pour le poste. Pierre est décoré de la médaille de l’Ordre de la Croix de Saint-Louis, rétabli dans ses fonctions de commandant dans l’Ouest et autorisé à poursuivre ses explorations.
 

Le 6 décembre, Pierre meurt subitement à Montréal et n’entreprend jamais le voyage qu’il avait prévu pour 1750. Au moment de sa mort, il n’est pas plus riche qu’il ne l’était au départ.
 

Après la mort de Pierre


1750 – Les marchands de fourrures rivaux se disputent le butin du territoire du Manitoba et du Missouri. Les droits des fils de La Vérendrye à succéder à leur père sont ignorés et les marchandises expédiées par Pierre et ses fils sont confisquées dans le cadre d’un audit intensif de la succession de Pierre. 


1756-1763 – La guerre de Sept Ans entre la Grande-Bretagne et la France, motivée par une rivalité commerciale et impériale, est peut-être l’épisode militaire le plus important des débuts de l’histoire canadienne. L’Alliance des Algonquins de l’Est se range du côté de ses alliés, les Français. 


1757 – Le comte de Bougainville raconte dans un mémoire sur les postes de la mer de l’Ouest que « l’une des activités commerciales de ce poste concerne les Panis (mot utilisé par les Français pour désigner une personne réduite en esclavage afin de ne pas insulter leurs alliés algonquiens); il s’agit d’une nation de [Premières Nations] que nous estimons à 12 000 (en référence aux Dakotas). Les autres nations leur font la guerre et nous vendent leurs esclaves. » Il poursuit en disant « qu’ils échangent en moyenne 40 à 60 esclaves ou panis par an » qui, selon lui, viennent de la région de la rivière Missouri. Il affirme qu’ils jouent le même rôle que les esclaves noirs en Europe.


1759 – Les Britanniques envoient des milliers de soldats supplémentaires d’Europe pour tenter de renverser le cours de la guerre. Cela se termine par la bataille décisive entre les Britanniques et les Français sur les plaines d’Abraham.


1760 – La Nouvelle-France au Canada est rattachée à l’Amérique du Nord britannique. La capitulation de 1760 maintient le système et la pratique de l’esclavage.
 

1909 – Naissance le 22 mars, à Saint-Boniface (Manitoba).

Crédits

BAILLEURS DE FONDS

Conseil des arts du Canada

CDEM

 

ÉQUIPE DE PRODUCTION

 

Directeur artistique

Rob Malo

 

Historien·nes

Philippe Mailhot

Janet La France

Mireille Lamontagne

 

Auteur·es

Janine Tougas

Élaine Tougas

Desmond Mentuk

 

Traductrices

Lina Le Gal, métchif

Karine Beaudette, français, anglais

 

Consultants autochtones

Steven Greyeyes

Desmond Mentuck

Aîné Stuart Prosper

Aîné Ally Stoneypoint

Révérend Ren McFadyen

Paulette Duguay, UNMSJM

 

Ingénieure du son et compositrice

MJ Dandeneau, MJ Entertainment

 

Équipe de ZenFri Inc.

Dee King, concepteur et responsable

Kelsey Meger, chef de projet

Christian Miranda, artiste

Vadym Mykytiuk, artiste

Kyle Gray, programmeur principal

Anne Friesen, programmeur

Sasha Gervais-Tourangeau, programmeur

Riley Lambert, programmeur

Rey Hill, traduction

 

Partenaires communautaires

Union nationale métisse de Saint-Joseph du Manitoba

Festival du Voyageur

Musée de Saint-Boniface

Maison Gabrielle-Roy

Archidiocèse de Saint-Boniface

Paroisse de la Cathédrale de Saint-Boniface

Centre du patrimoine

La Compagnie de La Vérendrye

 

Remerciements

Corey King, ZenFri Inc.

Ted Kuryluk, Winnipeg Fire Fighter’s Museum

Maxine et Louis, TiBert inc.

Description de toutes les chroniques.jpg
bottom of page