
Dans le cadre de la Semaine nationale de l'immigration francophone, des Manitobaines et Manitobains vous offrent un regard d'artiste sur leur expérience d'établissement dans cette province située au centre du Canada. Chacun des éléments présentés sur cette page permet d'ouvrir une autre page qui présente l'œuvre, l'artiste et ses réflexions sur l'immigration.
La princesse de Djanet

Je ne considère pas mon déménagement au Manitoba comme un changement de culture, mais plutôt l’addition d'une nouvelle culture à la mienne, le brassage culturel de Winnipeg est époustouflant et tellement inspirant. On se rend compte qu'on se ressemble beaucoup dans nos différences, et c'est ça qui fait la beauté du Canada.
Depuis toute petite j'adore la peinture, mais je n'en faisais pas beaucoup, faute de temps. Après mon établissement au Manitoba, les beaux paysages et la nature m'ont redonné goût à l'art.

Bouthaina
Portrait d’une identité non identifiée



Ces trois peintures sont trois « portraits » flous où l’on ne peut voir que l’allure d’un visage indéfini inspiré du négatif des photos. On ne peut identifier ni la couleur de la peau ni des yeux. Tout baigne dans le flou, la technique, les couleurs… juste un portrait inconnu.
Toute personne connaît certainement dans sa vie quelques moments d’incertitude et d’indécision où le futur lui paraît brouillé, que dire alors pour un immigrant. Rien n’est sûr et clair dans la vie. La pandémie aussi en est la preuve. L’artiste a immigré au Manitoba pendant la pandémie, mais l’œuvre était créée bien avant celle-ci. Elle exprime le flou de l’identité dans un pays anciennement colonisé et qui vit une « schizophrénie d’identité », dont l’avenir est complètement flou après la révolution… Un futur vague pour un nouveau diplômé, ou un immigrant, ou toute personne. Ceci a été exprimé intentionnellement par une technique spécifique : pas de lignes distinctes, les formes sont discernées et flottantes, les couleurs sont confuses. Et cela à travers la superposition de plusieurs couches transparentes et fines de couleurs vaporeuses travaillées avec le rouleau qui fait voir comme de la poudre sur la surface de la toile. Le noir n’est pas noir, le blanc n’est pas blanc, c’est plutôt une superposition de plusieurs couches de couleurs sombres ou claires qui offre une vibration.
Originaire de Tunisie, Sana Mimouna est arrivée à Winnipeg en 2020. Docteur en science et techniques des arts et peintre elle a fait ses études à l’Institut Supérieur des Beaux-Arts de Tunis (Tunisie) où elle a obtenu sa maîtrise en arts plastiques spécialité peinture en 2006, puis sa maîtrise en sciences et techniques des arts en 2009 tout en enseignant au Saltanat d’Oman, sur la côte sud-est de l’Asie occidentale.
Enseignante universitaire à l’Institut Supérieur des Arts et Métiers de Mahdia pendant quatre ans, elle a beaucoup aimé encadrer les projets de fin d’études spécialité création de bijoux et tissage, ainsi qu`animer les ateliers de biodesign, de dessin à vue, de dessin thématique et les ateliers de peinture. Elle a participé à plusieurs expositions

Sana
collectives en Tunisie avec des peintures et aussi à des foires organisées par l’Office National de l’artisanat avec ses créations de bijoux.
De plus, elle a persisté à avoir son doctorat alors qu’elle était mère de deux enfants et travaillait comme enseignante. Maintenant elle fait sa vie avec sa famille à Winnipeg, au Canada, en tant qu’enseignante en arts visuels à la DSFM et elle a fait partie de l’équipe de La Maison des artistes. « Cela m’a permis de découvrir les artistes canadiens et de m’enrichir des différentes démarches artistiques. » Elle anime des ateliers au Forum Art Centre et au CCFM.
Courriel : Sana.mimouna@gmail.com
Facebook : https://www.facebook.com/sana.mimouna
Caring for Mother Earth (Prenons soin de Mère Nature)

J’ai réalisé cette œuvre à l’occasion de la journée mondiale de la Terre 2021, sept mois après mon arrivée à Winnipeg. Après plus d’un an de pandémie, il me semblait important de remettre les choses en perspective. La terre est là, elle nous supporte et nous soutient. Que faisons-nous pour elle?
Après l’avoir peint, j’ai réalisé que pour la première fois de ma vie, je dessinais la planète Terre selon un autre angle de vue. En France, nous avons l’habitude de représenter le monde avec une vue eurocentrée. Sur ce tableau pour la première fois, je dessinais le monde focalisé sur l’Amérique. Un réel changement de point de vue pour moi qui s’est manifesté de cette manière. L’immigration, ce n’est pas seulement partir, quitter son pays, c’est aussi changer son regard sur le monde, ouvrir ses horizons, et je suis très heureuse de pouvoir le faire tout en continuant à m’exprimer dans ma langue maternelle.
Artiste autodidacte, Anne-Claire Joffroy est arrivée de France au Manitoba fin août 2019. Après des études de langue puis de tourisme et de marketing, elle a travaillé pendant 15 ans dans le secteur du tourisme et du commerce électronique. En 2016, elle a choisi de se consacrer à la peinture et a monté son entreprise d’édition de cartes en 2018. Elle travaille principalement avec la géométrie sacrée et sa palette est gaie et colorée. Dotée d’une grande créativité, Anne-Claire écrit également des chroniques dans Le Nénuphar et donne des ateliers d’art et de développement personnel au CCFM. Elle est également à l’initiative du projet de diorama Playmobil sur le thème des Voyageurs. Site Web : Un jardin sous les étoiles

Anne-Claire
Saisir son nouvel environnement






Quand on arrive dans un nouvel endroit, une bonne façon de s’y sentir à l’aise le plus rapidement possible est de l’explorer. Quoi de mieux que d’utiliser mon goût pour la photographie pour ce faire… Quand je prends une photo d’un lieu ou d’un paysage, j’ai l’impression de me l’approprier.
Maha et son mari, persuadés que le Manitoba était le bon endroit pour commencer un nouveau chapitre pour leur famille, sont arrivés de Tunis à la fin juillet 2019.

Maha
Tu n'es pas un arbre!
C'est un dicton arabe pour dire que tu ne dois pas être condamné à vivre dans un environnement qui t'est hostile... Aujourd'hui, je vais vous laisser rentrer dans mon intimité avec ma poésie. Je dédie Pécheresse à toutes celles qui ont subi, subissent et continueront à subir probablement jusqu'à la fin de leurs vies... Vous n'êtes pas des arbres, allez là où ça vous chante! N'écoutez pas ceux qui viendront vous dire « l'herbe n'est pas plus verte ailleurs », qu'est-ce qu'ils en savent? Peu importe la couleur de l'herbe en réalité, le plus important c'est comment VOUS vous la voyez... Je remercie la Médiathèque de l'Institut français d'Alger et spécialement Wafa Med pour l'opportunité qui m'a été donnée en devenant membre du Cercle des poètes (pas encore disparu jusqu’à maintenant). Ça me manque d'être face à un public sensible à toutes mes causes. Alors voilà, je vous confie une part de moi.

Pécheresse
J'ouvre mes yeux dans l'obscurité,
Pour moi, enfin, tout est limpide.
Dans ma tête, une décharge d'électricité,
Des bruits sourds, des images qui défilent, rapides...
Des scènes de malheur, d'atrocité,
Un paysage terne, triste et aride...
Je veux arrêter cette souffrance illimitée,
Je veux retrouver le calme, faire le vide...
J'essaye encore et encore, toute possibilité,
Je ne dois pas sombrer, je dois rester solide...
Mais ce tourbillon m'attire vers le bas, à l'infinité.
Dans ma tête c'est le chaos, le génocide.
Toute cette haine, cette agressivité,
À l'égard de mon âme, aux tendances morbides...
« Pécheresse », crie-t-on, avec fermeté,
Elle mériterait la torture, qu'on la lapide!
Nous ne pouvons tolérer ce genre d'hostilités,
Finissons-en, qu'on la trucide!
Qu'ai-je donc fait qui vous a tant irrité?
Je ne suis pas orgueilleuse, ni même cupide!
Que me reprochez-vous avec tant de sévérité?
Ai-je commis un péché aussi sordide?
Tu l'aurais voulu, avec tes imbécillités!
Te détacher de tes semblables était stupide!
Tu es un danger pour notre unicité!
Tu n'aurais pas dû jouer aux Caïds!
Ta voix, avec la nôtre, devait former l'unanimité!
Tu devais juste demeurer insipide...
À présent que tu t'es créé ta propre identité,
Que ton existence est sapide,
Tu as notre mépris jusqu'à l'éternité,
Tu es répugnante, tu es turpide!
Je ferme mes yeux dans l'obscurité
Condamnée à mort « sans appel », et ma société valide...
Originaire d'Algérie, Sarah Fellag vit à Winnipeg depuis la fin 2019 et est résidente permanente. Elle est responsable de la programmation et de l’animation d’une émission audiovisuelle sur Radio Al Wantan Canada, où elle traite de différents sujets relatifs à la vie des Maghrébins ici au Manitoba. Elle est auteure de la chronique Du Maghreb au Manitoba dans ce magazine.

Sarah
Capter ses passions



Durant la pandémie de COVID-19 et surtout avec la fermeture des écoles due à cette pandémie, Fatma reprend ses inspirations artistiques avec des capteurs de rêves et découvre d’autres univers dans la création de bijoux et surtout de boucles d’oreilles en polymère et résine « entre mes études, mon travail et ma famille ce n’est pas évident de garder une passion, mais lorsque j’ai un moment pour moi cela me détend. En faisant mes bijoux, je me retrouve dans mon univers, ma bulle ».
Originaire d’Algérie, Fatma Abed est arrivée à Winnipeg en 2019, enseignante en français pendant 10 ans au secondaire, un métier dont elle était amoureuse, partager et guider les enfants est source de bonheur pour elle. Durant sa dernière année en Algérie, elle s’est trouvée de nouvelles passions ainsi elle faisait des plateaux miroirs, des attrape‑rêves et des bougies personnalisées. Arrivant à Winnipeg où tout devait être reconstruit, surtout professionnellement, elle retrouve son environnement de travail avec des enfants dans une école de la DSFM.
Pour voir ses créations : Class&Shine Numidia

Fatma
La sérénité de la nature

Immigrer dans un nouveau pays m’a sorti de ma zone de confort et m’a aidé à mieux me connaître. Je me suis découverte plus sereine. Je traduis ma sérénité avec la représentation des sept chakras alignés. Le bois flotté apporte le lien avec la nature et les grands espaces canadiens. Les bois récupérés sont trempés dans un mélange désinfectant et certains sont traités avec de l’huile de protection transparente pour le bois. Je les travaille ensuite pour en faire des bijoux ou des objets décoratifs.
« Immigrer ouvre les esprits et ta vision de la vie sur toutes les belles choses qui existent sur terre. Je n’ai aucun regret. »



Originaire des Hautes Pyrénées en France, la montagne et la Méditerranée m’ont vu grandir. Touche-à-tout, je suis une manuelle depuis mon plus jeune âge, mon côté artistique s’est épanoui et révélé en arrivant au Canada. J’ai immigré à Winnipeg en décembre 2014. Repartir à zéro sur le plan professionnel, dans une culture anglophone, m’a permis de relativiser la vie que je voulais et mes priorités. En 2019 ArtMCreations est née : peintures acryliques avec citations inspirantes en français et en anglais, puis j’ai découvert le bois flotté récupéré au bord des lacs manitobains. Les décorations et les bijoux ont ainsi fait leur place au milieu de mes peintures. J’ai intégré la communauté francophone en travaillant depuis 2018 à l’Université de Saint-Boniface.
https://www.instagram.com/artmcreations/
https://www.facebook.com/artmcreations/

Marie-Cécile
Dis-moi si tu m'aimes
Le Manitoba m'a permis de m'enrichir culturellement, et de découvrir la francophonie à la fois dans sa richesse et sa singularité. J'ai ainsi découvert de nouvelles expressions que j'ai commencé à intégrer dans mon vocabulaire de rappeur. Je crois que le français est une langue malléable selon les régions, les communautés et les peuples qui le parlent. C'est une langue qui respire et qui s'adaptera, quels que soient les obstacles qui pourraient freiner son rayonnement provincial. Le rap me permet d'expérimenter avec la langue et de la faire vivre auprès des jeunes. Certains jeunes manitobains retrouvent ainsi un engouement pour le français à travers un style de musique qui leur correspond mieux aujourd'hui.
Réussir pour moi en tant qu'artiste ne se définit pas forcément en termes de carrière ou de gain financier (bien que tout cela joue un rôle), mais plutôt en termes d'impact sur une communauté. Je pense avoir trouvé une manière de toucher un public (les jeunes en l'occurrence). Même si ce n'était pas mon mandat de départ, je reconnais aujourd'hui l'importance pour moi de jouer ce rôle d'ambassadeur pour le rap francophone surtout en milieu scolaire et universitaire. Je vois la gratitude et la reconnaissance des enseignants à chaque fois que j'ai l'occasion de diriger un atelier d'écriture ou lorsque je fais une prestation scénique. Donc oui, pour moi je me vois réussir ici au Manitoba, car j'ai beaucoup plus d'espace de développement de projets en français. Je me sens bien ici.
Installé à Winnipeg depuis 2014, Alpha Toshineza a travaillé et a partagé la scène avec des artistes de tous horizons, démontrant ainsi que le rap est un style musical ouvert sur toutes les cultures. Rappeur, graphiste, auteur-compositeur et réalisateur de films, Alpha Toshineza (de son vrai nom Alain Tshinza) est un ambassadeur du rap francophone dans l’Ouest canadien. Né au Luxembourg de parents congolais, il a grandi en écoutant tous les styles de musique et en lisant des bandes dessinées. C’est ainsi que sa carrière artistique s’est partagée entre les arts visuels et l’écriture.

Alain
Dans son adolescence, Alpha a découvert le rap et a commencé à monter sur scène avec divers groupes avant de lancer sa carrière solo. Après des études de communication visuelle en Belgique, il retourne au Luxembourg pour travailler dans la publicité. Il décide finalement de tenter l’aventure canadienne avec quelques idées en tête. Il travaillera sur la production de ses deux albums : Jazz inuit (en 2016) et Triple A (en 2019) qui lui valent d’être mis en nomination deux fois aux Western Canadian Music Awards comme « Artiste francophone de l'année ». En 2017, il remporte le prix SOCAN de la meilleure chanson francophone pour son simple Dis-moi si tu m’aimes. Il participe notamment à plusieurs émissions télévisées telles que Balade à Toronto (UNIS TV), Planète BRBR (TFO) ou encore Belle et Bum (Télé-Québec).
Alain Tshinza est aujourd’hui graphiste indépendant et a monté sa société de communication Audiographic Studio ainsi qu’une maison de production Sonlight Operations. Il est également très impliqué dans les écoles où il a l’occasion de proposer des ateliers de rap en français. C’est pour lui une manière de transmettre son art à la prochaine génération et de contribuer à l’essor de la communauté francophone au Manitoba.
Sites Web (musique et média) :
www.alphatoshineza.bandcamp.com
www.sonlightoperations.com
www.behance.net/toshineza
Instagram, FB, YT, Spotify : @alphatoshineza
Gâteaux algériens




Choux à la crème aux noisettes
Brioche
Kalb Elouz

Macarons
La pâtisserie, c’est ma passion. Quand je suis venue ici, mon projet était donc d’ouvrir ma pâtisserie. J’ai réalisé que la pâtisserie orientale n’étant pas très connue et surtout très différente de la pâtisserie d’ici, le marché ne m’était pas trop favorable. Le rêve est toujours présent, mais j’ai dû me réorienter et, comme mon autre passion est l’enseignement, j’ai entrepris d’aller chercher mon diplôme en éducation à l’USB.
Au début, ne connaissant pas les produits équivalents aux ingrédients que j’utilisais en Algérie, j’obtenais de piètres résultats. Des amis installés ici depuis longtemps m’ont renseigné sur les marques et les endroits où me les procurer.
Ma formation en Algérie est celle d’ingénieur en mathématiques et informatique (comparable ici à la maîtrise). Arrivée en juillet 2020, en pleine pandémie, je ne possédais pas l’anglais et j’ai dû reconsidérer mon métier. J’ai choisi Winnipeg et je me donne la chance de la découvrir et de m’adapter.

Leila